France

Syrie, une solution politique, mais avec qui? Les divergences entre Manuel Valls et François Fillon

Le débat entre Manuel Valls et François Fillon s'est achoppé sur la question syrienne. Si tous deux estiment que la résolution du conflit sera avant tout politique, demeure la question de savoir qui en seront les protagonistes. Verbatim d'un débat...

«Il faut traiter le sujet au fond», voilà une des rares affirmations qui aura fait l'unanimité entre l'ancien et l'actuel Premier ministre lors du débat Des Paroles et des Actes diffusé sur France 2 ce 24 septembre.

«Des erreurs d'appréciation»

Pour François Fillon, qui brigue ouvertement l'investiture du parti Les Républicains, si les gens se jettent sur la route de l'exil, c'est évidemment en raison de la crise au Moyen-Orient. D'emblée, il a reproché au gouvernement de Manuel Valls d'avoir des «préjugés» qui ont empêché et empêchent toute solution: «Vous devez abandonner un certain nombre de préjugés sur la Russie, et même sur le régime de Bachar el-Assad, afin de constituer une coalition la plus large possible pour faire face à ce qui est un danger mortel, un danger pour la paix du monde».

Manuel Valls bottera alors en touche en soulignant que c'est précisément le gouvernement de François Fillon qui avait coupé toute relation avec la Syrie de Bachar el Assad: «Je veux rappeler que c'est Nicolas Sarkozy et vous son Premier ministre (...) qui avez coupé tout lien, qui avez rappelé l'ambassadeur [en Syrie]».

Un fait aisément reconnu par l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy: «Je reconnais qu'il y a eu des erreurs qui ont été commises. Pour ma part, je considère que l'analyse de la crise syrienne a été une mauvaise analyse». François Fillon développera alors l'idée que la crise syrienne n'avait pas commencé par une révolte populaire, comme il le pensait à l'époque, mais qu'il sagissait en fait «du démarrage d'une guerre de communautés largement alimentée par l'Arabie saoudite et l'Iran».

Discuter ou pas avec Bachar el-Assad, le point d'achoppement

La position de François Fillon, durant tout le débat s'en est tenue à l amenace que représente selon lui l'organisation Etat islamique: «Quand on est devant une menace comme celle-là, on rassemble toux ceux qui sont capables, quelqu'ils soient, de lutter contre elle». 

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Pourtant si le diagnostic a été le même pour Manuel Valls, sa solution s'en tiendra à la position officielle de la France: pas de négociation avec Bachar el-Assad que Manuel Valls tient pour responsable de la mort de «250 000 personnes». «On ne peut passer cela par pertes et profil» ajoutera-t-il, refusant ce qu'il appelle «une réponse schématique» à la crise syrienne.

La question des relations entre la France et la famille el-Assad sera aussi au centre d'une joute verbale tendue. C'est François Fillon qui ouvrira la salve en précisant: «Je connais les relations entre les hommes politiques français de gauche ou de droite avec [elle]». Manuel Valls lui fera remarquer que c'est bien Nicolas Sarkozy qui avait invité Bacher el-Assad lors du défilé du 14 juillet 2008, ce qui lui attirera la réponse suivante: «Oui et François Mitterrand était en visite officielle en Syrie quelques semaines après le massacre de 30 000 personnes et Jacques Chirac était aux obsèques de Hafez el-Assad. Je connais cette histoire et je connais aussi d'autres tyrans dans la région».

François Fillon, à l'instar d'Angela Merkel qui a estimé qu'il fallait parler avec le président syrien pour résoudre la crise du pays, objectera que la crise syrienne déborde de ses frontières «Je dis simplement qu'il y a une urgence (...). Si vous ne prenez pas la mesure d'une crise qui déstabilise le monde de l'Afghanistan au Nigeria, elle risuqe de menacer la paix du monde et de l'Europe».

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Discuter avec la Russie et l'Iran, le point d'accord

Autre point, rare, sur lequel les deux hommes ont semblé arriver à un accord, la nécessaire discussion avec deux acteurs clés de la crise: l'Iran et la Russie. Manuel Valls a ainsi rappelé que les président iranien et russe étaient attendus, séparément, à Paris: «Vous dites, il faut dialoguer avec tout le monde. Mais vous avez parfaitement raison. C'est la diplomatie française de Laurent Fabius qui a permis le retour de l'Iran sur la scène par exemple« a-t-il indiqué avant d'ajouter «nous dialoguons avec les Russes».

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Il ajoutera toutefois que c'est précisément l'intervention en Libye, qu'il rappelle avoir soutenu, ainsi que le parti socialiste, «qui a marqué une rupture de confiance avec les Russes qui ont considéré que l'intervention avait été au-delà de ce qui avait été décidé aux Nations unies». 

Manuel Valls appellera également de ses voeux la formation d'une coalition: «Nous sommes prêts à soutenir une large coalition de pays régionaux qui peuvent intervenir, l'Arabie saoudite, l'Iran, l'Egypte ou la Turquie».