France

Incitation à la haine raciale : les autorités françaises feraient du deux poids-deux mesures

L’arrestation d’une cinquantaine de personnes y compris le célèbre humoriste Dieudonné pour incitation à la haine après la tuerie de Charlie Hebdo a déclenché des débats féroces sur l’étendue de la liberté d’expression en France.

L’humoriste controversé Dieudonné M’bala M’bala, plus connu sous son nom d’artiste «Dieudonné», est encore au centre des débats. Il a été détenu pour avoir posté le message «Je me sens Charlie Coulibaly» sur sa page Facebook, associant le nom du magazine satirique au nom du terroriste auteur d’une prise d’otages et de cinq homicides.


«Le terrorisme, le racisme et l’antisémitisme ne sont pas des opinions, ce sont des délits», a déclaré le Premier Ministre français Manuel Valls.

Сinquante-quatre personnes dont quatre mineurs ont déjà été condamnés sur comparution immédiate pour incitation à la haine et apologie du terrorisme en vertu de mesures anti-terroristes spéciales consécutives aux attentats de la semaine dernière.


L’apologie du terrorisme peut valoir cinq années de prison en France. Le même délit commis en ligne peut cependant ajouter deux années supplémentaires à la sentence.

Dieudonné doit comparaître en février, la mobilisation sur internet pour la fin des poursuites à son encontre est massive. Le message principal de la campagne fait référence à la contradiction qui existe du point de vue de la liberté d’expression entre le fait de glorifier Charlie Hebdo, dont les dessins sont insultants aux yeux de nombreux musulmans, et de faire taire Dieudonné.

La page Facebook de soutien à l’humoriste controversé comte déjà plus de 900 000 «J’aime».


L’humoriste a déjà fait face à des poursuites pour racisme et antisémitisme. Il a défendu ses sketches au nom de la liberté d’expression, recourant à des arguments similaires à ceux des dessinateurs de Charlie Hebdo.

«On cherche un prétexte pour m'interdire», a-t-il écrit dans une lettre ouverte au ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. «On me considère comme un Amedy Coulibaly alors que je ne suis pas différent de Charlie».

Yvonne Ridley de la Ligue des Musulmans d’Europe a dit sur RT que, « puisque la France se positionne pour la liberté d’expression et la liberté de la presse, elle doit également donner ce droit à des humoristes comme Dieudonné ». Mais les libertés à deux vitesses, d’après elle, sont « monnaie courante en Occident ».

Le prophète Mahomet fait la couverture du dernier numéro de Charlie Hebdo en portant une pancarte « Je suis Charlie », un détournement jugé déplacé par de nombreux musulmans.


Des défenseurs des droits de l’homme ont évoqué l’impact négatif de ce genre de caricatures sur la communauté musulmane.

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« Certaines caricatures de Charlie Hebdo ont été largement jugées insultantes», a dit Raza Nadim, porte-parole du Comité musulman des affaires publiques en Grande-Bretagne. « Nombreux sont ceux qui les ont trouvées racistes, islamophobes et blessantes envers une minorité déjà opprimée. »

L’avocat français Michael Wacquez, qui représente 54 personnes détenues pour apologie du terrorisme, a prévenu que les autorités françaises n’étaient pas au bout de leurs peines si elles devaient arrêter toutes les personnes qui ont défendu le point de vue des islamistes dans l’affaire de Charlie Hebdo.

« Il y a 40 mille tweets là-bas exprimant leur soutien pour les terroristes. Qu’est-ce que nous allons faire avec tous ces gens ? Est-ce que les prisons françaises sont prêtes à accueillir 40 mille personnes parce qu’elles ont fait une mauvaise blague sur Tweeter? », s’est demandé Wacquez dans un entretien avec l’AFP.