Dans un courrier adressé aux chefs d'établissement, le 18 mars 2020, le rectorat de l'académie de Nantes a décidé de faire comprendre aux enseignants que, dans un contexte de confinement, ils n'étaient pas soumis au même régime que les autres citoyens. Le recteur William Marois a ainsi pris sa plume pour «suggérer» aux enseignants de se déplacer et de trouver des subterfuges, afin d'assurer la continuité pédagogique : «Comme l'accès à une école ou à un établissement scolaire n'entre pas dans les justificatifs de déplacement, je suggère d'utiliser un commerce autorisé de proximité comme point de relais où les familles concernées pourraient retirer et rendre documents, devoirs et livres.»
Pour le recteur, ce conseil s'adresse particulièrement aux élèves d'éducation prioritaire renforcée, des documents pédagogiques papier devant «être préparés et remis aux familles». Cette consigne n'entre-t-elle pas en contradiction avec les injonctions du gouvernement ? Le recteur représente le ministre de l'Education nationale au sein de l'académie. Or, celui-ci, Jean-Michel Blanquer, a recommandé le télétravail avec la promotion de la plateforme «Ma classe à la maison».
Par ailleurs, l'exécutif a rappelé le 19 mars que trop de Français semblaient prendre «à la légère» les règles de confinement. Ainsi, les mots de William Marois ont logiquement crispé le personnel. Un collectif baptisé «Sauvons les lycées» s'est offusqué sur Twitter : «Elle est belle, la mise en danger volontaire des enseignants pour masquer les "trous dans la raquette" de l'Education nationale et de Jean-Michel Blanquer face au confinement.»
Le syndicat FSU a également réagi, avec vigueur, dans un communiqué adressé au recteur : «Vous demandez tout simplement aux agents de l’Etat de contrevenir à la loi en se comportant ainsi, puisqu’il s’agit de contourner les dispositions réglementaires. Se rendre dans un commerce autorisé pour y déposer ou y prendre des documents scolaires ne relève en rien des achats de première nécessité autorisant un déplacement.» La FSU estime d'ailleurs que «dans la situation actuelle, [...] cette disposition augmente grandement les risques de contamination aussi bien pour les enseignants que pour les familles».
La FSU demande de fait à William Marois, «au plus vite, de donner un contre-ordre à cette préconisation». Celui-ci n'a, pour l'heure, pas réagi.