France

Un père «peut être une femme, évidemment» : la majorité sur le pont pour défendre sa loi sur la PMA

Face aux inquiétudes que soulève l'ouverture de la PMA à toutes les femmes, notamment pour les enfants qui se verront privés de père, députés de la majorité et ministres ont rivalisé d'arguments pour expliquer en quoi cela ne serait pas un problème.

Depuis plusieurs semaines, la majorité monte au créneau pour défendre son projet de loi controversé sur l'ouverture de la PMA à toutes les femmes. Ce dernier suscite en effet des inquiétudes au-delà des sphères politiques, puisque l'Académie nationale de médecine a effectué une mise garde, estimant notamment que «la conception délibérée d'un enfant privé de père» constituait une «rupture anthropologique majeure».

Des inquiétudes que s'évertue à balayer la majorité, que ce soit devant les parlementaires à l'Assemblée nationale ou face aux Français sur les plateaux de télévision. Florilège des arguments – parfois alambiqués – avancés par les députés du parti présidentiel et les membres du gouvernement.

Sur la chaîne LCP le 24 septembre, la ministre de la Santé Agnes Buzyn a ainsi jugé que la fonction du père était avant tout symbolique, et pouvait à ce titre être assurée par une femme. «Ca peut être une femme évidemment. Ca peut être une altérité qui est trouvée ailleurs dans la famille, des oncles, une grand-mère : tout nous démontre aujourd'hui que ce qui compte c'est l'amour et la sérénité autour de l'enfant», a-t-elle affirmé.

La Garde des Sceaux, Nicole Belloubet, s'est quant à elle attelée à la délicate tâche consistant à expliquer aux parlementaires comment les deux femmes d'un couple ayant procréé par PMA seraient l'une et l'autre légalement considérées comme la mère de l'enfant. «L'accouchement de l'une des deux femmes est la condition de l'établissement de la filiation, et la reconnaissance conjointe est la condition pour le double lien de filiation maternelle», a-t-elle ainsi fait savoir. Dans un souci d'égalité entre les deux mères, la ministre de la Justice a précisé un point fondamental, à savoir que «l'accouchement n'était pas la cause de la filiation».

Quelques jours auparavant, le député LREM Jean-Louis Touraine, professeur de médecine, préférait insister sur l'aspect positif du projet de loi, se félicitant qu'il soit désormais possible d'être mère sans avoir accouché, ce qui selon lui résoudra «de nombreux problèmes pour de nombreux enfants».

Le 3 octobre à l'Assemblée nationale, le même Jean-Louis Touraine a écarté tout problème concernant la pluriparentalité que pourrait impliquer le projet de loi, soutenant que cette problématique «[existait] déjà avec les familles recomposées». «Ce n'est pas un spectre, c'est la réalité d'aujourd'hui», a-t-il déclaré.

Plus étonnant encore, Aurore Bergé, député LREM, a pour sa part choisi de déplacer le sujet, pensant qu'il serait rassurant d'expliquer qu'il n'était pas question d'altérer les droits existants des parents hétérosexuels. «Ni dans ce projet de loi, ni aujourd'hui, ni demain, nous n'empêcherons quelconques parents hétérosexuels de vouloir concevoir un enfant de manière charnelle», a-t-elle ainsi soutenu dans l'hémicycle le 2 octobre.

Enfin, la député Coralie Dubost s'est quant à elle penchée sur les enfants issus d'un même donneur : pour éviter de les qualifier de demi-frères et sœurs, elle a opté pour un néologisme, employant le terme... «demi-génétiques».

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