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Rétropédalage ? Laurent Wauquiez juge que l'élargissement de l'UE «a été une profonde erreur»

Le président des Républicains matraque que la liste de son parti s'oppose à l'élargissement de l'Union européenne, vu comme «une erreur». Et Laurent Wauquiez s'excuserait presque d'avoir été un ex-militant de l'élargissement lorsqu'il fut ministre ?

Retournement de veste et mea culpa ? Sur France info le 17 mai, Laurent Wauquiez a rappelé que la liste menée par François-Xavier Bellamy pour Les Républicains (LR), lors des élections du 26 mai, était opposée à l'élargissement de l'Union européenne à l'inverse, selon lui, de la position que tiendrait Emmanuel Macron. Il a avancé que, contrairement aux Républicains, «le président de la République propos[ait] l'entrée de l'Albanie». «Les négociations avec l'Albanie vont s'ouvrir en juin, on opposera notre veto», a prévenu le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Toutefois, il convient de préciser que la tête de liste des macronistes pour les européennes, Nathalie Loiseau, avait réfuté sur BFMTV, le 9 mai, toute nouvelle adhésion au sein de l'UE, notamment de l'Albanie : «J'ai gagné pour qu'on n'ouvre pas les négociations d'adhésion à l'Albanie et à la Macédoine du Nord [...] Ces pays ne sont pas prêts et l'Union européenne n'est pas prête.»

Laurent Wauquiez pense de fait «que l'élargissement a été un des principaux facteurs de l'affaiblissement de l'Union européenne et [qu'il a été] une profonde erreur».

Ministre chargé des Affaires européennes sous Nicolas Sarkozy, il défendait pourtant en 2011 l'élargissement de l'UE aux Balkans. Désormais, Laurent Wauquiez reconnaît qu'il «ne se contente pas de battre sa coulpe» : «On a fait de profondes erreurs en allant beaucoup trop loin dans l'élargissement, il faut donc corriger le tir.»

«La réalité c'est que quand il y a trop de pays autour de la table, on n’arrive plus à s’entendre. La réalité c'est que les niveaux de vie, les systèmes économiques et sociaux sont trop différents et donc, on arrive plus à s'harmoniser», argumente-t-il.

Laurent Wauquiez matraque la position anti-élargissement de l'UE, après que le leader de la liste du Rassemblement national Jordan Bardella a accusé l'eurodéputé LR Arnaud Danjean – troisième sur la liste portée par François-Xavier Bellamy – d'être favorable à l'adhésion de la Turquie. Pour Jordan Bardella, Arnaud Danjean aurait voté entre fin avril et début mai «au Parlement européen, en commission, des crédits de plusieurs milliards d’euros pour l’intégration de la Turquie dans l’Union européenne». Une allégation qui se révèle d'ailleurs fausse comme le rappelle Le Monde, «les députés européens ne siègeant plus (et donc ne votent plus) depuis le 18 avril».

En réalité, ce vote au sein du Parlement européen a eu lieu précédemment, et Arnaud Danjean n'a pas voté en faveur des crédits en question, mais s'est abstenu... pour des raisons justement liées à la Turquie.

Enfin, on peut difficilement soupçonner Les Républicains d'être en faveur de l'adhésion de la Turquie. Depuis la fin des années 2000, l'UMP puis LR a majoritairement tenu en son sein une position contre cet élargissement-là, à l'instar de Nicolas Sarkozy qui, en 2014, affirmait que la Turquie n'était «pas en Europe et n'avait pas vocation à entrer en Europe».

Si Les Républicains sont contre l'élargissement et reconnaissent officiellement l'erreur de celui-ci, l'un de leur chef de file au sein de l'UE dans le groupe PPE, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, a de son côté affirmé qu'il ne regrettait pas la vague d'adhésions de 2004. Actuellement composée de 28 Etats (en comptant le Royaume-Uni), l'UE doit étudier les cas de six prétendants : l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Serbie et la Turquie. Néanmoins, tant Emmanuel Macron qu'Angela Merkel ont estimé, le 29 avril à Berlin, que l'actualité n'était pas «à la politique d'élargissement de l'UE mais bien à une politique de stabilité régionale [dans les Balkans]».

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