20 personnes ont été interpellées dans la nuit du 25 mars dans le département de la Seine-Saint-Denis après des violences visant des Roms. Ces derniers sont désignés par des rumeurs sur les réseaux sociaux comme étant à l'origine d'enlèvements d'enfants, selon une source policière citée par l'AFP.
«Plusieurs rixes et violences» avaient été constatées dès le début de soirée le 25 mars dans les villes de Clichy-sous-Bois et Bobigny, selon cette source, qui précise néanmoins que personne n'a été blessé dans ces localités. Les 20 personnes arrêtées ont été placées en garde à vue.
Ces violences font suite à la multiplication, sur les réseaux sociaux, de messages alarmants évoquant des tentatives d'enlèvements d'enfants ou d'adolescents par des personnes circulant en camionnette dans plusieurs localités d'Ile-de-France, en particulier les Hauts-de-Seine et la Seine-Saint-Denis.
Evoquant une «rumeur infondée», la préfecture de police a fait savoir à l'AFP «qu'aucun enlèvement, ni dans les Hauts-de-Seine, ni en Seine-Saint-Denis» n'était «avéré». La préfecture a par ailleurs émis un tweet dans ce sens. «Suite au partage de cette rumeur sur les réseaux sociaux, deux personnes ont été injustement accusées puis lynchées», a souligné la préfecture.
Des vidéos disponibles sur les réseaux sociaux montrent des cas de violences contre les Roms avec des sous-titres sans équivoque.
Contactée par RT France, Anina Ciuciu, porte-parole de l'association La Voix des Rroms a estimé que cette flambée de violences était en réalité liée à un phénomène «très ancien» : «Il s'agit d'un stéréotype séculaire véhiculé sur les Roms», a-t-elle ajouté. Mais elle a également tenu à souligner que «ces rumeurs de prétendus kidnappings [avaient été] démenties par les juges et les enquêteurs.»
La porte-parole a aussi déploré que «la propagation de ces rumeurs soit aggravée par la célérité des réseaux sociaux.» Selon elle, la violence envers les Roms «est favorisée par la vulnérabilité et la précarité de ces populations marginalisées. C'est facile de s'en prendre à eux.» Anina Ciuciu précise par ailleurs que des antécédents avaient été constatés au cours du mois de mars, et que des plaintes seraient prochainement déposées à cet égard.
L'avocate en appelle à présent à la responsabilité de l'Etat à propos de ces violences : «Après l'affaire du jeune Darius laissé pour mort dans un caddy de supermarché en 2014, qui s'est soldée par un non-lieu, nous demandons aux autorités de prendre acte du phénomène. Il y a selon nous deux volets à prendre en compte : tout d'abord, nous attendons une vraie justice suite à ces intimidations, ces menaces et ces violences à Bondy, à Bobigny, à Noisy-le-Sec, à Colombes et à Montreuil. Ensuite, nous souhaitons que les réseaux sociaux prennent leurs responsabilités après que des incitations à la haine ont été constatées sur leurs plateformes.»
Anina Ciuciu exige enfin une «protection immédiate» de ces «personnes terrorisées» de la part des services de police.
Le 16 mars à Colombes (Hauts-de-Seine), une vingtaine de jeunes avaient pris à partie les occupants d'une camionnette, qui faisait l'objet de rumeurs, selon une source policière, avant d'incendier le véhicule. Les deux hommes, blessés, ont réussi à s'extirper du véhicule pour se réfugier dans un hall d'immeuble. Ils n'ont pas porté plainte.
En Seine-Saint-Denis, le commissaire de Clichy-sous-Bois/Montfermeil, David Moreira, avait adressé le 25 mars un communiqué aux communes de son secteur pour appeler à la «prudence car une certaine psychose commence à s'installer.».
Les «nombreux signalements» reçus par les services de police «sont analysés avec la plus grande précaution», affirme une source proche du dossier, insistant sur le fait qu'il n'y avait «pas de cas avéré d'enlèvement de mineurs par des Roms» dans le département.