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Chalon-sur-Saône, menu sans porc ou pas, la laïcité se met à table

La décision du maire de la ville de supprimer dès la rentrée le menu de substitution sans porc a fait l'objet d'un recours devant la justice. Au-delà de cette question apparemment anodine, c'est la notion de laïcité qui se pose aussi.

La Justice devra rendre en fin de semaine sa décision sur le référé réclamant la suspension de la décision de Gilles Platret, maire Les Républicains de Chalon-sur-Saône, de mettre fin au menu de substitution sans porc dans les cantines scolaires de la ville. 

Cette suppression, décidée à la mi-mars, avait pourtant déclenché une vive polémique. La ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, avait alors dénoncé une décision qui prend «en otage les enfants». Seuls le Front National et Nicolas Sarkozy avaient à l'époque apporté leur soutien au maire, tandis que plusieurs responsables des Républicains prenaient leurs distances avec cette décision.

Un cas d'école

Le recours a été introduit devant le tribunal administratif de Dijon par la Ligue de défense judiciaire des musulmans qui souligne qu'un menu de substitution au porc est servi dans les cantines scolaires de la ville depuis 1984 sans que cela ne soulève de problème.

Pour l'un des avocats de l'association, Me Nicolas Gardères, pas de doute, la décision du maire contrevient tout simplement aux principes de liberté de conscience et de culte : «les grands principes constitutionnels, les conventions internationales ou même le code de l'éducation défendent ces libertés. C'est sur ce fondement que nous estimons qu'il y a une possible illégalité de cette décision. A ce jour, le juge français ne s'est jamais vraiment prononcé sur cette question et ce référé sera l'occasion pour lui de combler un vide d'interprétation» explique-t-il ainsi à RT France. 

L'avocat de l'Association est aussi interpellé par les motivations du maire à prendre un telle décision, avant tout politique : «Il veut aller sur le terrain du Front national, en présentant une droitre anti-immigrés et anti-Islam. Il s'agit de stigmatiser les musulmans». 

Pourtant, la  mairie se défend de toute volonté de stigmatisation en indiquant que de toute façon 40% des enfants qui mangent à la cantine ne mangent pas du tout de viande car elle n'est pas halal.

La Laïcité, principe républicain ou fourre-tout idéologique ?

Contactée par RT France, la mairie de Chalon-sur-Saône renvoie aux arguments développés par l'avocat de la ville : «la laïcité est une abstention et n'oblige pas à fournir à chacun ce qu'il attend pour l'exercice de son culte en exigeant des prestations différenciées». Autrement-dit, au nom de la laïcité, nulle obligation ne saurait être faite aux autorités municipales de fournir des repas de substitution.

Pourtant, du côté de l'Observatoire de la laïcité, dirigé par Jean-Louis Bianco, on se montre prudent. Contacté par RT France, l'Observatoire estime ainsi «que si aucune obligation ne contraint la commune dans le cadre d’un service facultatif, la laïcité ne saurait être invoquée pour refuser la diversité de menus». 

L'Observatoire rappelle également qu'il recommande aux écoles «une diversité de menus, avec ou sans viande. Offrir un tel choix ne répond pas à des prescriptions religieuses mais à la possibilité pour chacun de manger ou non de la viande, tout en empêchant la stigmatisation d’élèves».

Pour Me Nicolas Gardères, cette affaire illustre surtout comment la laïcité est devenue, selon lui, un concept fourre-tout : «c'est un totem mis à toutes les sauces. On a l'impression que maintenant la meilleure défense de la laïcité en France est Marine le Pen. C'est risible. La laïcité, c'est la neutralité vis-à-vis de l'ensemble des religions. Or, dans cette affaire, il y a une volonté de stigmatiser, de discriminer une population en particulier. Plus encore, on le fait par le truchement des enfants. Pourtant, cela fait des années que l'Etat français recommande des menus de substitution quand il y a du porc à la cantine. Auparavant, cela ne posait pas de problème. Mais pour des raisons bassement politiques, cela l'est soudain devenu».

Quoiqu'il en soit, cette question agitera la rentrée, la ville de Perpignan ayant également indiqué en juin qu'elle proposerait désormais un menu végétarien aux enfants ne mangeant pas de porc. Début juillet, c'était au tour de Toulouse d'annoncer la mise en place d'un menu sans viande dans les cantines de ses écoles primaires.