Marlène Schiappa, la secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les femmes et les hommes, est en colère. Sur les réseaux sociaux, les commentaires haineux à son égard pleuvent, blâmant le coup de massue porté à l’élégant dragueur français par son projet de loi visant à réprimer le harcèlement de rue. Le coq français n’aurait plus, contraint par l’armature dictatoriale de sa loi, le droit de siffler une femme, ni même de lui lancer une œillade.
Or la secrétaire d’Etat a adressé le 1er août un commentaire lapidaire à ses détracteurs, signifiant qu’il n’en avait jamais été question, texte de loi à l'appui.
Alors que le Sénat venait d'approuver l'accord trouvé en commission mixte paritaire avec l'Assemblée nationale sur le projet de loi sur les violences sexuelles et sexistes, différentes infographies et articles de presse se sont mis à fleurir le 31 juillet dans les médias et sur les réseaux sociaux. Ils ont compilé les mesures proposées par la secrétaire d'Etat en matière de harcèlement de rue.
On apprenait dans ces médias que les commentaires sur le physique et la tenue, un sifflement, un regard appuyé pourrait coûter entre 90 et 750 euros à l’audacieux harceleur ou séducteur, selon le point de vue. Un grand nombre d'internautes se sont insurgés contre cette limitation de leur liberté.
Pourtant il ne s'agit là que d'interprétations erronées. Le texte ne fait mention que de termes vagues pour définir l’outrage sexiste, mais dans lequel un simple regard ou un sifflement ne pourraient trouver leur place. Il s’agit du fait d’imposer «à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante».
Les faits entrant dans le cadre de cet outrage seront passibles d’amende de catégorie 4, allant de 90 euros en paiement immédiat à 750 euros, voire de catégorie 5 (jusqu’à 3 000 euros) en cas de récidive ou de circonstances aggravantes.
D'où viennent ces «regards appuyés» et ces «sifflements» ?
Une infographie sur le harcèlement sexuel et les violences sexistes publiée par le secrétariat à l’Egalité entre les femmes et les hommes sur l'arsenal législatif préexistant au projet de loi a pu créer cette confusion. En effet, les sifflements, regards, commentaires sur le physique y sont bien mentionnés en tant que faits constitutifs de harcèlement mais il n’est nullement question de verbalisation. Ces comportements, et d’autres tels que les propos sexistes et les questions intrusives, sont simplement qualifiés d’inacceptables, et il est recommandé de les «signaler aux sociétés de transport en commun».
Le secrétariat à l'Egalité entre les femmes et les hommes s'est empressé de dissiper ce malentendu qui avait déclenché les foudres des réseaux sociaux.
Au sujet des sifflements, Marlène Schiappa avait déclaré en octobre 2017 au journal Le Monde : «Je pense, à titre personnel, que siffler une femme dans la rue ne relève pas du harcèlement, mais que c’est le cas lorsqu’on la suit dans le métro. Dans ce cas, le stress, voire l’intimidation, sont évidents.»