C'est un texte à même de tester les limites du vaste rassemblement au sein de La République en marche (LREM). Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb présente le 21 février en Conseil des ministres le projet de loi Asile et immigration, avec comme délicate mission de contenter toutes les sensibilités politiques de la majorité, et notamment l'aile gauche de LREM.
Deux mesures phares visant à faciliter les expulsions ressortent du projet : le doublement de la durée maximale de rétention à 90 jours (voire 135 en cas d'obstruction) et la réduction d'un mois à 15 jours du temps maximal de recours devant la Cour nationale du droit d'asile.
Pour désamorcer les critiques sur la logique de fermeté du texte formulées par des députés LREM issus de la gauche du paysage politique, le ministre de l'Intérieur assure qu'il sera aussi question d'apporter «des protections aux plus vulnérables». C'est d'ailleurs cet aspect là que le ministère met désormais en avant dans sa réforme, insistant sur l'attribution de titres de séjour plus longs pour les apatrides ou encore une vigilance particulière sur les pratiques d'excision chez les réfugiées. Gérard Collomb précise d'ailleurs que le volet fermeté du texte répond au besoin de s'aligner sur le droit européen. «Le problème principal tient à notre législation, qui par rapport aux législations européennes, est beaucoup plus favorable», soutient-il dans les colonnes du Figaro.
Soucieux de donner des gages à son aile gauche, le gouvernement s'est en outre engagé par la voix d'Edouard Philippe à reprendre un certain nombre d'éléments du rapport sur l'intégration remis par le député LREM Aurélien Taché, selon Le Point. En premier lieu desquels le renforcement de l'apprentissage de la langue française mais aussi l'inscription à un parcours professionnel, l'accélération de l'accès à l'emploi, à la formation ainsi qu'au logement pour les demandeurs d'asile.
La logique répressive du texte critiquée
Autant d'engagements qui n'ont cependant pas convaincu une partie des députés de LREM qui s'interrogent toujours sur la logique répressive du texte. «Nous sommes un certain nombre à craindre des mesures trop restrictives pour les libertés individuelles», affirme ainsi une députée LREM citée par Le Figaro. Un sentiment auquel avait fait écho le député LREM Jean-Michel Clément dans l'hémicycle, à l'occasion de l'adoption de la proposition de loi sur la rétention des étrangers la semaine dernière : «Les plus fragilisés seront sanctionnés. Il n'est pas interdit de mettre un peu d'humanité dans un texte de loi.»
Plus consensuel, le député LREM Matthieu Orphelin, transfuge d'Europe Ecologie Les Verts, estime que «le travail parlementaire va permettre de continuer à rééquilibrer le texte». Mais les discussions s'annoncent serrées pour amender le projet, avant les débats parlementaires en mars-avril.