Le candidat à la présidentielle Emmanuel Macron avait affiché sans ambiguïté sa volonté de construire l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes pendant sa campagne. «Le peuple s'est exprimé, je suis pour respecter cette décision», déclarait-il sur France Inter, au sujet du référendum organisé en juin 2016 en Loire-Atlantique. Lors de celui-ci, les habitants s'étaient prononcés à une large majorité pour la construction du nouvel aéroport. Or, le 17 janvier 2018, le gouvernement a finalement annoncé que le projet serait abandonné.
Cette décision a entraîné des réactions très contrastées sur l'échiquier politique, les Républicains (LR) reprochant au gouvernement de céder face aux zadistes et de ne pas respecter le référendum qui s'était tenu sur la question – et la parole d'Emmanuel Macron de respecter ce suffrage. Le Parti socialiste (PS) a pour sa part appuyé sur le déni de démocratie que représenterait un tel revirement. La France insoumise (LFI) et les écologistes ont de leur côté salué une décision, qui va selon eux dans le sens de l'intérêt général... tout en exprimant leurs craintes quant à l'évacuation à venir de la ZAD.
«Mépris de l'expression populaire»
Le président des Républicains Laurent Wauquiez ne s'est pas embarrassé de commentaires superflus pour marquer sa désapprobation. Il a simplement publié sur son compte Twitter une vidéo d'Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle, pointant du doigt le revirement du désormais président sur la question. Ce dernier avait assuré face à Bruno Retailleau, sur le plateau de L'Emission politique de France 2, son souhait de respecter la consultation de juin 2016 : «Il y a eu un vote. Mon souhait très clairement c'est de le respecter. Donc de faire [l'aéroport].»
«C'est un mépris de l'expression populaire et une victoire accordée aux zadistes», tempête de son côté Lydia Guirous, porte-parole des Républicains, s'interrogeant en outre sur le montant d'un tel renoncement.
Une question que se pose également l'ancien ministre Eric Woerth, qui souhaite «rendre publics les coûts directs et indirects pour l'Etat» de l’abandon du projet, qu'il juge par ailleurs être une «défaite considérable pour la décision publique».
Présidente du conseil régional des Pays de la Loire et donc directement concernée par cette décision, Christelle Morançais (LR) estime qu'il s'agit non seulement «d'une victoire des zadistes sur l'Etat de droit», mais aussi d'un «coup de poignard pour le développement économique et l'attractivité du Grand ouest».
Un point de vue partagé par le maire de Nantes Johanna Rolland (Parti socialiste), qui parle à l'instar de l'ancien Premier ministre socialiste Jean-Marc Ayrault, de «déni de démocratie».
S’asseoir sur les résultats des référendums devient en France une habitude détestable
Même son de cloche du côté du Front national (FN) : «Marine Le Pen avait annoncé lors de la campagne qu’elle respecterait le résultat de la consultation locale tout en regrettant les conditions de mise en œuvre de cette consultation. Quoi qu’il en soit, s’asseoir sur les résultats des référendums devient en France une habitude détestable», déclare le parti dans un communiqué.
«L'intérêt général a fini par prévaloir», saluent Insoumis, écologistes... et Philippe de Villiers
Du côté de La France insoumise (LFI), le son de cloche est totalement différent. Le député Eric Coquerel salue «une grande victoire pour les opposants, pour l'environnement, pour l'intérêt général contre l'intérêt particulier de groupes type Vinci».
Adrien Quatennens, député insoumis du Nord, loue une «sage décision» et espère que le gouvernement fera preuve de la même sagesse concernant l'évacuation de la ZAD.
«Ce qu'il convient de faire maintenant : respecter les zadistes et les paysans, assurer l'avenir des belles expériences menées sur place, renoncer à l'évacuation violente, apaiser et construire», propose dans le même sens le sénateur Europe Ecologie Les Verts Esther Benbassa.
L'argument de l'intérêt général, vu comme l'emportant sur le résultat du référendum local, a également été repris par Philippe de Villiers, président du Mouvement pour la France (MPF). L'ex-député de la Vendée a chaleureusement salué l'abandon du projet d'aéroport.
Le Premier ministre Edouard Philippe a donné jusqu'au printemps aux occupants pour évacuer d'eux-mêmes la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, faute de quoi ils «en seront expulsés». «Nous mettrons fin à la zone de non-droit», a assuré le locataire de Matignon lors de l'annonce de l'abandon du projet le 17 janvier.
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