Après les nombreuses critiques essuyées par le réseau social Twitter, accusé de diffuser des fake news, de censurer la moindre nudité mais de laisser prospérer des contenus de propagande, d’incitation au djihad ou à la haine, Twitter a progressivement durci ses contrôles et ses conditions d’utilisation. De nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 18 décembre, bannissant les «conduites haineuses».
Les comptes identitaires tels que ceux des membres du mouvement politique Britain First, ceux du groupe anti-immigration et anti-islam Génération identitaire ou encore de la page Pont d’Arcole (28 000 abonnés) sont alors passés à la trappe. Le compte de Yann Merkado, le fondateur du site suavelos, a lui aussi été supprimé, tandis que le compte du site n’a pas été banni.
La mesure a donc frappé les comptes du mouvement anglais anti-immigration et anti-islam Britain First, dont les chefs de file, Paul Goulding et Jayda Fransen, ont été expulsés du réseau. Cette dernière était sortie d’un relatif anonymat grâce au retweet par le président américain Donald Trump de trois vidéos virales ciblant des musulmans, qu'elle avait postées sur son compte. D’autres comptes contrevenant aux nouvelles règles ont été suspendus, comme celui de la Ligue de défense juive.
Les comptes identitaires se rebiffent
Un des comptes bannis de Twitter le 19 décembre, Génération identitaire, n’est pas interdit de Facebook, et s’est plaint de censure sur ce réseau social le lendemain des faits : «Le moins que l'on puisse dire, c'est que la liberté d'expression n'est plus qu'une illusion dans notre pays. Dénoncer l'immigration et l'islamisation, mettre en garde notre peuple sur les dangers qui le guettent se paie plus que jamais au prix fort. Un comble dans un pays où les islamistes ont déjà tué plus de 200 Français depuis 2015.»
Jugé par ses adeptes comme plus mesuré que d'autres comptes bannis, Pont d’Arcole, qui avait proposé dans un sondage sur les Femen de les «dissoudre à l'acide chlorhydrique», a ressuscité immédiatement sous le nom de @pontdarcole2.
Yann Merkado s’est quant à lui étonné d’avoir été admis à l'origine sur ce réseau : «C'était louche qu'ils laissent s'exprimer un intrus subversif sur leur réseau réservé aux gauchistes LGBT, aux gauchistes racailles et aux gauchistes LMPT (La Manif pour tous).»
Twitter se défend de toute censure
Se défendant de toute censure, Twitter met en avant que les comptes dérogeaient à son nouveau règlement qui proscrit les «conduites haineuses». Menaces, incitations à la violence ou harcèlement sur des critères tels que «la race, l'origine ethnique, la nationalité, l'orientation sexuelle, le sexe, l'identité sexuelle, l'appartenance religieuse, l'âge, le handicap ou la maladie grave» sont désormais prohibés. Il est aussi interdit d’utiliser des images ou symboles haineux dans l’image ou la bannière de profil.
«Nous n'autorisons pas les comptes dont le but principal est d'inciter à nuire aux autres sur la base de ces catégories», explique le réseau social.
Twitter avait commencé par retirer son badge bleu de certification d'authenticité à certaines personnalités politiques comme Richard Spencer, le président du National Policy Institute, un think tank nationaliste dont certains membres avaient notamment accueilli la victoire de Donald Trump par des saluts nazis.
Bataille rangée sur les réseaux sociaux
Les identitaires dont la page a été clôturée ont en tout cas pu trouver du soutien chez certains politiques. Jean Messiha, ancien coordinateur de la campagne de Marine le Pen, a inventé un hashtag pour défendre bec et ongles la page Pont d'Arcole sur le réseau. «Nous sommes no 2 en Top Tweet. Continuez à réagir avec le hashtag #soutienapontdarcole», a-t-il écrit dans un message.
Stéphane Ravier, conseiller régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur, sénateur Front national des Bouches-du-Rhône, considère les exclusions de Génération identitaire et de Pont d'Arcole comme «inacceptables dans une démocratie saine».
Certains usagers de Twitter en ont appelé à la liberté d’expression.
L'utilisateur d'un compte dans la veine identitaire redoute la censure et appelle à tenir tête à la «dictature de la bien-pensance».
Un autre compte dénonce la censure de «l'oligarchie».
D'autres utilisateurs se réjouissent de la suppression de ces comptes. «Fin 2018, les fachos vont en être réduits à communiquer entre eux à l’aide de pigeons voyageurs», se félicite cet internaute.
Un autre usager prévient que les comptes supprimés ne sont que «les premiers de la longue liste de vos comptes haineux» qu'ils vont «faire sauter».
Avant même que les règles ne soient durcies, Twitter avait effectué un ménage des comptes faisant l'apologie du terrorisme. Le réseau social a annoncé en juin 2017 avoir fermé depuis 2015 près de 940 000 comptes.