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Terrorisme : A l’instar de la Tunisie, la Turquie craint d'être boudée par les touristes

Suite à l'attentat qui a fait 32 morts en Turquie ce lundi, et celui de Sousse en Tunisie, Didier Arino estime que ces deux pays vont souffrir du manque de touristes dans les mois à venir. Comme tous les pays en proie à des troubles géopolitiques.

Didier Arino, directeur du cabinet d'études et de conseil Protourisme, estime, suite aux attentats en Turquie et en Tunisie, qu'il faudra du temps à ces deux pays avant d'attirer autant de touristes que dans le passé.

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RT France : La Tunisie, puis hier la Turquie, touchées par des attentats, sont des pays souvent privilégiés par la clientèle française durant les vacances. Quels sont les effets de ces attentats sur le tourisme ?

Didier Arino : Les effets des problèmes géopolitiques sont toujours néfastes pour le tourisme. La multiplication des attentats, des troubles sociaux, ont poussé bon nombre de Français à rester dans l'hexagone. Cela a pour conséquence une hausse importante de la fréquentation en France avec une hausse de 4,5% du taux de réservation. Pour les pays du Maghreb, la chute ne fait que s'accentuer depuis plusieurs années et cela atteint cet été son paroxysme pour la Tunisie. Nous avons eu quelques annulations, mais c'est surtout l'absence de réservations de dernière minute qui est marquante. La Tunisie, et la Turquie dans une moindre mesure, sont des destinations, privilégiée par les Européens en réservation de dernière minute. Ce sont ces réservations qui manquent à l'appel.

RT France : La géopolitique a toujours d'importantes conséquences sur le tourisme...

Didier Arino : Oui et on le note aussi avec ce qu'il se passe en Grèce, où il y a une baisse des réservations depuis les troubles, même si cela repart depuis l'apaisement de la situation. La destination la plus touchée reste le Maghreb qui avait su diversifier sa clientèle après le départ important des Français. Ils avaient su renouveler leur clientèle avec des Russes, des Britanniques, des Belges... L'attentat de Sousse a touché aussi cette clientèle nouvelle qui évitait une baisse trop forte du tourisme.

RT France : Pensez-vous que les conséquences sur la Turquie, suite à ce sanglant attentat, seront les mêmes ?

Didier Arino : Avant l'attentat de ce lundi, la Turquie était une destination déjà décevante en terme de clientèle française pour cet été. Les images du conflit à Kobané, la proximité avec la Syrie ont dissuadé un certain nombre de nos concitoyens de partir en Turquie et cela malgré les promotions majeures offertes par les tour-opérateurs français. Cet attentat risque d'aggraver encore la situation.

RT France : Quelles sont les conséquences pour ces pays de la désertion des touristes ?

Didier Arino : Tout dépend évidemment du pays. La Turquie dépend du tourisme, mais pas à la mesure de ce que cela peut représenter pour la Tunisie ou la Grèce. En Turquie, l'économie est plus diversifiée, la clientèle l'est aussi. Ils sont moins dépendants de la France. En revanche, en Tunisie, toute chute du tourisme a pour conséquence un appauvrissement des populations qui vivent en grande partie du tourisme. En Tunisie, un emploi sur cinq est directement ou indirectement lié au tourisme. C'est la même chose pour la Grèce. Pour bon nombre de ces pays, le tourisme permet de faire rentrer des devises fondamentales, mais permet aussi l'emploi dans le pays.

RT France : Combien de temps un pays met-il pour se relancer dans le domaine du tourisme ?

Pour la Grèce, le redressement peut être très rapide et la reprise a déjà débuté. En revanche, en cas d'actes terroristes comme en Tunisie ou en Turquie, le problème est la perception de l'insécurité. Les Européens savent qu'ils ne sont pas à l'abri, mais la perception d'une insécurité grandissante pose un réel problème. Et cela peut prendre beaucoup de temps pour revenir.

RT France : En janvier, la France aussi a été touchée par le terrorisme. Cela a-t-il eu des répercutions sur le tourisme ?

Clairement, le tourisme français a été touché par les attentats du mois de janvier. Cela s'est surtout remarqué sur des clientèles venant de destinations lointaines notamment les Américains ou les Asiatiques. Pour ces populations, la France est un pays lointain et ces images sont marquantes. Cela est d'autant plus vrai que cela était au cœur d'une campagne sur l'insécurité souvent grossie par les médias étrangers... L'attentat contre Charlie Hebdo a aussi entraîné une baisse de la clientèle fortunée du Moyen-Orient qui ne voulait pas forcément venir à Paris dans ces conditions. Il faut bien voir que les Français ne réagissent pas différemment, avec la Turquie ou la Tunisie, des touristes étrangers avec la France. Plus le pays est lointain, plus on se fie à quelques images, même si elles faussent la réalité du pays.  

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