Il y a le discours, ferme, d'Emmanuel Macron et du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb. Et il y a la réalité d'après le Sénat. «[Le gouvernement] sera dans l'incapacité de tenir ses engagements en matière d'éloignement [des clandestins]», dénonce ainsi la Commission des lois du Sénat dans un avis du 23 novembre 2017 cité par Le Figaro. «Si le président de la République a annoncé, le 15 octobre 2017, son intention d'expulser les étrangers en situation irrégulière ayant commis un délit, son gouvernement n'y consacre pas les moyens nécessaires», déplore encore le président de cette même commission.
D'après l'avis, accablant, seuls 14 500 «éloignements forcés» (traduire : des expulsions de personnes en situation irrégulière en France) seraient ainsi budgétés dans la loi de finances de 2018. Soit moins que sous le mandat de François Hollande. Pour le sénateur Les Républicains (LR) du Rhône François-Noël Buffet, la lutte contre l'immigration clandestine est encore le «parent pauvre» du budget de l'Etat. «92 076 mesures d'éloignement ont été prononcées en 2016 et seules 18% d'entre elles ont été réellement exécutées [...] pour cette seule année 2016, 75 587 personnes se sont maintenues sur le territoire français malgré la mesure d'éloignement prononcée à leur encontre», a ainsi recensé, chiffres à l'appui le sénateur, cité par Le Figaro.
Double discours ?
Pourtant Emmanuel Macron, tout en se montrant attaché à l'accueil des réfugiés, a en même temps fait montre de fermeté le 21 novembre dernier. «En France on va protéger tous les gens qui relèvent de l'asile, qui ne sont pas en sécurité chez eux, mais on ne peut pas accueillir tous les gens qui viennent avec des visas de commerce ou d'étudiant et qui restent après», avait ainsi affirmé le chef de l'Etat lors d'une visite aux Restos du cœur.
Largement adoptée par les députés le 21 novembre 2017 en vote solennel, avec 356 voix pour et 175 contre, la première loi de finances du quinquennat d'Emmanuel Macron est arrivée au Sénat. Aussi, faute de majorité écrasante de La République en marche (LREM) dans la chambre haute du Parlement, contrairement à l'Assemblée nationale, les choses pourraient se compliquer.
Alexandre Keller
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