L’annonce de la nomination de Nicolas Hulot en tant que ministre d'Etat en charge de la Transition écologique le 17 mai 2017 avait immédiatement suscité l’incrédulité chez les militants ou les personnes sensibles au développement durable. Quelques mois plus tard, après plusieurs arbitrages perçus de manière mitigée, Nicolas Hulot est plus que jamais remis en question par son premier public. Lorsque le ministre de l’environnement a déclaré le 7 novembre que les objectifs de réduction à 50% de la part du nucléaire dans le mix énergétique d’ici 2025 étaient irréalistes, il a fait gronder la colère de toutes parts.
Hulot «mange son chapeau» et «avale des couleuvres»
A droite ou à gauche, Nicolas Hulot ne semble trouver grâce aux yeux de personne et se voit attribuer un solide appétit pour des mets non comestibles. Yannick Jadot, eurodéputé Europe Ecologie les Verts, interviewé sur France Info le 8 novembre, se désole de l'annonce du ministre, «qui n'avale plus des couleuvres [mais] des boas constricteurs», selon lui. «Et pire que ça, aujourd’hui, il se fait le porte voix des lobbies», ajoute l'ancien allié de Benoît Hamon à la présidentielle. Il tonne : «Nicolas Hulot, c’est le symbole de l’engagement écologique [...] Et vous avez les mois passant un ministre qui cède sur les perturbateurs endocriniens, sur le CETA, sur le glyphosate, maintenant sur la transition énergétique.»
Il rappelle que des études contredisent le verdict pessimiste de Nicolas Hulot sur la part du nucléaire.
Corinne Lepage, présidente de CAP21, ancienne députée européenne, a été tout aussi sévère sur l'antenne de Cnews. «Il avait pris des positions ces derniers temps qui étaient vraiment très claires. C’est lui qui est revenu sur les 17 réacteurs qu’on va fermer en étant extrêmement catégorique», estime-t-elle. «En bon français, il a mangé son chapeau», évalue l'ancienne députée. S'appuyant sur des dossiers, elle note qu’on «peut augmenter les énergies renouvelables et travailler sur l’efficacité énergétique».
Christian Jacob, président du groupe Les Républicains à l’Assemblée, ironise sur le prétendu retour «à la réalité» de Nicolas Hulot. Là encore, le ministre fait l'objet de vives critiques. «J'espère que le chapeau de Monsieur Hulot a bon goût, parce qu'il va le manger plusieurs fois», s'amuse Christian Jacob au micro de Patrick Cohen dans Europe Matin. Pour le député LR, le nucléaire «est l'énergie la plus propre et la moins chère que nous ayons». «S'il s'agit de fermer des centrales pour remettre des centrales thermiques en route, ça n'a aucun sens», ajoute-t-il.
Audrey Pulvar, directrice actuelle de la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l'homme, que le ministre a créée, s'inquiète aussi de ses déclarations sur le nucléaire : «Ce qui est inquiétant dans la déclaration de Nicolas Hulot, c'est le signal qu'il envoie à tous les promoteurs de l'énergie nucléaire, à tous ceux qui ne sont pas prêts à faire des efforts nécessaires pour faire monter dans notre pays les énergies renouvelables, réduire la part des énergies fossiles et nous permettre de sortir du nucléaire.»
La twittosphère raille Nicolas Hulot, mal à l'aise à son poste
Une avalanche de tweets moqueurs ou critique a suivi l'annonce de Nicolas Hulot sur le nucléaire. Un internaute l'imagine en train de fuir en 4X4 à la fin du mandat.
Un internaute militant pour l'environnement l'imagine au contact des lobbies.
Une autre lui sert son plat du moment
D'autres s'amusent à imaginer sa marge de manœuvre au gouvernement.
Pourquoi Hulot a-t-il déçu?
Pour de nombreux militants, la déclaration faite le 7 novembre par Nicolas Hulot a fait l'effet d'un coup de massue : «Si l'on veut maintenir la date de 2025 pour ramener dans le mix énergétique le nucléaire à 50%, ça se fera au détriment de nos objectifs climatiques. Et ça se fera au détriment de la fermeture des centrales à charbon et probablement que si l'on voulait s'acharner sur cette date, il faudrait même rouvrir d'autres centrales thermiques.»
Nicolas Hulot s'appuie en fait sur un rapport prévisionnel de RTE, le gestionnaire du réseau haute tension de transport d’électricité, qui annonce des perspectives inquiétantes : la France pourrait mettre en péril sa sécurité d’approvisionnement en période hivernale d’ici quatre ans en fermant les centrales obsolètes. Or, ce rapport de RTE, qui n'est autre qu'une filiale d'EDF, est perçu comme biaisé par Yannick Jadot.
Autre dossier sensible sur lequel le ministre déçoit la sphère écologiste : les perturbateurs neuro-endocriniens. Les spécialistes du sujet lui reprochent de ne pas avoir fait valider un texte plus restrictif début juillet, Nicolas Hulot lui-même ayant avoué dans Libération : «Nous n’avons pas gagné cette guerre, mais nous avons gagné une bataille et ouvert un front important.»
Quant à l'aéroport de Notre Dame des Landes, dont le site de construction est actuellement occupé par les opposants au projet, Nicolas Hulot, jadis farouche opposant au projet, avait déclaré au moment du vote régional sur le sujet en juin 2016 : «On ne peut pas demander d’aller voter et si le résultat ne nous plaît pas, ne pas en tenir compte». Actuellement, le ministre assure qu'il se pliera «à la décision indépendante du gouvernement» consécutive au travail de cette médiation de la mission qui examine le dossier et pourrait valider sa construction.
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