France

Les routiers en colère contre les ordonnances : blocages et opérations escargot partout en France

Le 25 septembre à l'aube, les routiers ont lancé un mouvement de grève reconductible contre la réforme du Code du travail voulue par le gouvernement. Blocages routiers et pénurie d'essence sont à prévoir. Le gouvernement affirme qu'il ne cédera pas.

Lundi 25 septembre

Le gouvernement va réunir le 28 septembre le patronat et les syndicats des transporteurs routiers, a fait savoir le ministre des Transports Elisabeth Borne.

«L'enjeu c'est de lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale. C'est tout le sens de l'engagement du président de la République et du gouvernement, notamment dans le cadre de la discussion sur la directive travailleurs détachés ou sur le paquet routiers», a-t-elle expliqué sur BFM TV.

Les routiers ne doivent pas s'inquiéter en revanche de la réforme du Code du travail, a-t-elle affirmé. Celle-ci «ne modifie pas» le temps de travail des routiers, ni leur rémunération qui restera fixée au niveau de la branche, a ajouté la ministre.

Elisabeth Borne a précisé que son cabinet prendrait contact dès le 26 septembre avec les organisations patronales et syndicales pour préparer la réunion.

L'approvisionnement des stations services «est assuré normalement» et «la quasi-totalité des dépôts de carburants est libre d'accès» à la mi-journée, en dépit de la grève des routiers CGT et FO, a assuré le 25 septembre le ministère des Transports contacté par l'AFP.

Le dépôt de carburants de La Mède (Bouches-du-Rhône) est libre d'accès après avoir été bloqué dans la matinée, comme ceux de Coignières (Yvelines), Vatry (Marne) et Bassens (Gironde), a-t-on appris de même source.

Le gouvernement est prêt à «continuer les discussions» avec les représentants des routiers, qui ont «de vraies inquiétudes», a déclaré le 25 septembre le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner pour qui les Français ne doivent cependant «pas être empêchés d'aller travailler».

«Je sais la responsabilité des chauffeurs routiers, ils doivent aussi accepter de discuter, d'échanger, et nous voulons les rassurer. [...] S'ils le souhaitent, ils seront évidemment reçus à nouveau», a-t-il assuré.

«La particularité, c'est qu'on a des entreprises qui sont différentes des autres. Notamment parce que les salariés, les chauffeurs, ne sont pas dans l'entreprise, ils sont sur la route tout le temps. Donc les conditions du dialogue social dans les entreprises ne sont pas les mêmes dans les TPE», a également déclaré le porte-parole du gouvernement.

«Ensuite, les Français ne peuvent pas être empêchés de travailler, d'aller étudier, de vivre», a-t-il estimé, tout en affirmant ne pouvoir pas garantir qu'il n'y aurait pas de pénurie d'essence.

«Moi j'invite chacun à la responsabilité, à commencer par les camionneurs qui sont légitimes à s'exprimer mais ils ne doivent pas bloquer la France. Notre pays et notre économie en particulier n'en ont pas besoin», a conclu Christophe Castaner.

D'après le site Mon essence, 84 stations-service sont en rupture de stock partielle, tandis que 57 stations sont totalement à sec.

Du Pas-de-Calais à Marseille en passant par Gennevilliers, les camionneurs expriment leur inquiétude et manifestent en bloquant routes, raffineries et dépôts pétroliers. La grève est reconductible, selon des responsables CGT et FO cité par l'Agence France presse.

Dès 6h, le plus grand dépôt d'hydrocarbures d'Ile-de-France, à Coignières, était bloqué par des routiers en colère.

Des scènes similaires se déroulaient au même moment dans de nombreuses autre villes : Le Havre, Rouen, Bordeaux, Marseille, Lyon et Nantes, notamment. A Caen, en revanche, des internautes faisaient état de la levée du barrage par la police dès le 24 septembre dans la nuit. Mais une nouvelle opération escargot a repris dès 6h le lendemain.

Evoquant les blocages en cours en Ile-de-France, aux abords des dépôts pétroliers, Jérôme Vérité, numéro un de la Confédération générale du travail, CGT-Transports, s'est félicité de la réussite de la mobilisation : «Elle est à la hauteur de nos attentes», a-t-il déclaré à l'AFP. Il a ensuite précisé qu'une action était en cours à un péage près de Lyon. Pendant ce temps, au pétrolier de la Mède près de Marseille, «rien ne rentre et rien ne sort», s'est réjoui un responsable de la CGT sur place.

Les routiers CGT et Force ouvrière (FO) ont appelé à une grève reconductible. Selon eux, la réforme du code du travail menace les protections des salariés et implique une diminution de rémunération. Les camionneurs souhaitent aussi attirer l'attention que le détachement de salariés européens sur les territoires étrangers induit par une directive européenne et exprimer des revendications salariales pour les conducteurs de matières dangereuses.

Le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner, a réagi au micro de la radio France Inter. Il a souhaité relativiser le «mouvement d'emballement» aux pompes à essence et a admis que l'inquiétude des routiers était «légitime», rappelant cependant, qu'il n'avait pas de «sucres» à distribuer aux camionneurs. Plus ferme, il a ensuite conclu : «Je les invite à ne pas bloquer la France, car c'est la plus mauvaise façon pour eux de se faire entendre.»

Même son de cloche pour Benjamin Griveaux, secrétaire d'état à l'Economie : «Ce n'est pas en bloquant l'économie française que nous ferons en sorte [qu'elle] aille mieux», a-t-il répété au micro de RTL, ajoutant que le gouvernement continuerait, selon lui, «à être dans le dialogue», mais aussi «à être ferme».

Les routiers n'ont, pour l'instant, obtenu qu'un engagement du gouvernement sur le maintien du dispositif de retraite anticipée dont ils craignaient la disparition, mais ils souhaitent dénoncer la perte d'une partie de leurs revenus, notamment une prime d'ancienneté représentant 6% des salaires (environ 120 euros).

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