Damien Carême, maire Europe Ecologie Les Verts (EELV) de Grande-Synthe (Nord), a rencontré le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb Place Beauvau le 18 septembre, pour lui demander d’améliorer le contexte sanitaire du campement sauvage du bois du Puythouck, dans sa commune.
Pour Claire Millot, secrétaire générale de l’association d'aide aux migrants Salam, contactée par RT France, l’évacuation du camp le lendemain de la rencontre ne doit rien «au hasard». Le périmètre du bois où s’abritaient les migrants est en effet désormais totalement bouclé, interdiction étant faite aux journalistes et associations d’y pénétrer, comme l'indique un journaliste pour M6 sur Twitter.
«On a vu sept autocars, il y a plus de gendarmes que de migrants, c’est une grosse évacuation comme on n’en a jamais vu ici», déclare Claire Millot.
Durant l’opération, la bretelle d’accès à l’A16 a été fermée à la circulation. Selon une source policière, environ 200 CRS étaient sur les lieux pour procéder aux évacuations. «Les forces de l’ordre [faisaient jusqu'alors] des "nettoyages" comme disent, deux fois par semaine, mais ils ne ramass[ai]ent que les tentes et jett[ai]ent les affaires des migrants», explique à RT France Claire Millot. Or, cette fois, les forces de l'ordre semblent avoir voulu démanteler définitivement ce camp sauvage.
Un camp sauvage aux conditions de vie catastrophiques
Dans le camp, on comptait une majorité de Kurdes Irakiens, d’Afghans, d’Iraniens, de Pakistanais et de Soudanais, selon Claire Millot. «La situation climatique se dégrade, au dernier comptage de mes services il y avait 56 enfants présents, une quarantaine de femmes, moi je ne laisse pas perdurer cette situation plus longtemps», avait déclaré Damien Carême à l'AFP avant son entrevue avec Gérard Collomb du 18 septembre.
Le 11 avril 2017, un feu s'était déclaré dans le camp de la Linière à la Grande-Synthe à la suite d'une rixe, ravageant les chalets en bois qui y étaient construits. Depuis, les migrants s'étaient installés dans le camp sauvage du bois du Puytouck, qui présentait des conditions de vie déplorables. «Au début, on marchait dans les excréments», raconte Claire Millot.
«Jusqu’ici les migrants se lavaient dans le plan d’eau du bois», explique-t-elle également. «Or il commence à faire froid, c’est boueux, c’est difficile de se mettre en petite tenue pour se laver. Il n'y a pas de toilettes depuis avril. Seuls quatre robinets pour 400 personnes ont été installés depuis juillet» a-t-elle précisé.
«On ne peut pas les laisser ainsi. La gale revient, les maladies reviennent», avait de son côté tonné le maire écologiste de Grande-Synthe. Il avait donc souhaité être reçu par Gérard Collomb le 18 septembre pour demander à l'Etat de prendre en charge cet «accueil temporaire, de transit, le temps qu'on organise le départ vers les CAO (centres d'accueil et d'orientation)». Il avait aussi insisté sur le fait que dans un cas similaire, pour les migrants de Calais, le Conseil d’Etat demandait que des installations telles que l’accès à l’eau pour boire et se laver, ainsi que des latrines, soit prévues.
Collomb opposé à la création d'un nouveau camp légal à Grande Synthe
Or, le maire de Grande-Synthe a fait état d'«un refus catégorique» à sa requête, a-t-il regretté au sortir de l'entretien du 18 septembre. Le ministre de l’Intérieur a estimé dans un communiqué que la réouverture d’un camp encadré par les autorités «conduirait à conforter, dans leur volonté de partir au Royaume-Uni, les personnes qui viennent à Grande-Synthe, poussées en ce sens par des passeurs qui doivent être combattus avec la plus grande fermeté». Selon le ministre, une solution d’hébergement existe déjà, avec le centre de Bailleul.
Pour autant, après son entrevue avec le ministre, Damien Carême a confirmé son intention d’installer des sanitaires, des points d'eau et des douches. Il a ajouté que d'ici la fin du mois de septembre, le dispositif serait en place.
Le démantèlement en guise de réponse du gouvernement
La réponse de l’Intérieur a été quasi immédiate, et le déploiement policier a été organisé le 19 septembre au matin. Pourtant selon l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii), «l'opération a été préparée en amont. Plus de 400 hébergements ont été dégagés dans les CAO pour les mises à l'abri.»
«Nous savons pourtant qu’il n’y a pas assez de places dans les deux camps [légaux] de Bailleul et de Troisvaux autour, les migrants vont donc être placés beaucoup plus loin», observe Claire Millot. «Quand les forces de l’ordre venaient les chercher, il en restait toujours 150 ou 200 qui se cachaient aux alentours. Cette fois, ils veulent ramasser tout le monde. Ils ont mis une benne à ordure de telle taille qu’ils vont tout jeter. Il ne va plus rien rester», estime-t-elle. Les services de Damien Carême ont été contactés par RT France mais le maire n’était pas disponible pour répondre aux questions.
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