Le 16 juin au matin, France Inter a fait savoir sur ses ondes qu'une plainte avait été déposée contre Manuel Valls devant la cour de Justice de la République [une juridiction d'exception chargée de juger les ministres qui auraient commis un délit dans l'exercice de leurs fonctions au gouvernement], pour «entrave à l'application d'une loi». Explication.
Le 15 mars 2017, le conseil d'Etat, la plus haute juridiction administrative française, a annulé la décision du gouvernement de Manuel Valls de ne limiter qu'aux seules villes de Paris et Lille l'encadrement des loyers, qui constituait une des mesures phares de la loi Alur, mise en place par Cécile Duflot.
Cette loi devait à l'origine être appliquée dans plus de 1 000 communes françaises, mais le Premier ministre Manuel Valls y était particulièrement réticent. Par ce geste, il entendait surtout faire un pied de nez à l'ex-ministre du logement Cécile Duflot, démissionnaire quelques mois plus tôt. Tenante d'une ligne de gauche, Cécile Duflot s'était à de multiples reprises opposée à ce qu'elle considérait comme une dérive droitière du gouvernement Valls, et les relations avec son Premier ministre étaient des plus tendues.
«Excès de pouvoir» et «entrave à l'application d'une loi»
En 2014, le porte-parole d'Europe Ecologie Les Verts (EELV), mouvement dont est issue Cécile Duflot, Julien Bayou avait déposé un recours pour «excès de pouvoir» qui aboutit donc à cette annulation du conseil d'Etat en mars dernier. En effet, Manuel Valls n'avait pas le droit de ne pas faire appliquer la loi Alur.
C'est pourquoi, le 15 juin, l'avocat maître Afane-Jacquart a déposé plainte contre l'ex-Premier ministre devant la Cour de Justice de la République pour «entrave à l'exécution de la loi Alur».
L'accusation considère que Manuel Valls, en tant que dépositaire de l'autorité publique a commis une infraction. Le procureur général auprès de la Cour de cassation devra désormais décider si cette plainte sera poursuivie ou classée sans suite.
C'est donc un véritable coup dur pour Manuel Valls, à deux jours d'un scrutin décisif des législatives qui déterminera la suite de sa carrière politique. D'autant plus que l'ex-candidat à la présidentielle Benoît Hamon, sous la même étiquette socialiste que Manuel Valls, a déjà appelé à voter dans l'Essonne pour le candidat de la France Insoumise Farida Amrani.
Pour mémoire, l'ancien Premier ministre s'était vu placé en tête des personnalités les plus rejetées, de «l'infamie politique», selon le baromètre de l'institut de sondage Odoxa, le 29 mai.
Avec une hausse de 4 points, Manuel Valls suscitait le rejet de 54% des sondés, devançant ainsi pour la première fois Marine Le Pen (53%), elle-même en hausse de deux points.