France

Les joies de la randonnée, enfin accessible aux non-voyants

Cinq randonneurs aveugles ou malvoyants ont étés guidés le long de 80 kilomètres d'un sentier dans les Vosges, avec pour seule assistance un GPS et leur canne blanche. Une première, qui leur ouvre la porte vers une plus grande autonomie.

C’est grâce à cette prouesse technologique, l’application mobile Navi’Rando, que cinq randonneurs aveugles ou malvoyants ont traversé la semaine dernière les Vosges en quasi-autonomie. «Jamais je n'aurais imaginé m'aventurer tout seul sur ces chemins», a avoué l’un d’entre eux.

La marche de 80 kilomètres s’est déroulée sans l’aide de guide voyant, leur permettant ainsi une plus grande liberté et de vivre l’aventure au maximum. La voix du GPS transmettait les directions et potentiels dangers comme les virages et bifurcations du sentier.

Des indications tels que «Point 15, 11h, 194 mètres» signifie que dans moins de 200 mètres, il faudra tourner «11h» (légèrement à gauche). L’application a été développée par l’université de Strasbourg et l’itinéraire préalablement numérisé par des bénévoles de la Fédération française de randonnée pédestre.

«Ce qui reste difficile, c'est de repérer avec la canne l'emplacement exact du sentier», declare Jean-Claude Heim à AFP.

«Il faut rester très concentré», ajoute-t-il. Une concentration qui ne l'empêche pas de profiter de «tout ce qu'on peut récupérer du paysage : les odeurs, les sensations tactiles, la pluie, le bruit des oiseaux…»

Le plus impressionnant pour ces randonneurs est la liberté de mouvement permise par l’application. «C'est formidable de retrouver ce sentiment de liberté», s'enthousiasme Nicolas Linder, «95% d'entre eux [aveugles ou malvoyants] ont du mal à sortir de chez eux» ce qui pourrait changer avec cette découverte.

«L'étape d'après, c'est de faire en sorte que ça puisse marcher partout, même dans des endroits où on ne capte pas le signal GPS», explique Jesus Zegarra à l’AFP, un ingénieur en électronique qui travaille depuis cinq ans sur ce projet au sein de l'Université de Strasbourg.

 

Pour que l’application marche partout, c'est la «centrale inertielle», c'est-à-dire le gyroscope, l'accéléromètre et même le baromètre (pour mesurer les variations d'altitude) du smartphone qui devront le relais. «On pourrait ainsi imaginer que les aveugles puissent se déplacer seuls dans les couloirs du métro», souligne M. Zegarra.

 

«Nous espérons que cette application va aider à changer le regard porté sur le handicap, et donc à améliorer l'accès à l'emploi des déficients visuels», souligne Laurence Rasseneur, enseignante-chercheur à la faculté des sciences du sport de Strasbourg et membre de l'équipe qui a mis au point l'application.

A ce stade, «le défi n'est pas technologique, mais humain», estime Mme Rasseneur. «C'est une révolution culturelle à engager, il faut des pionniers pour montrer que c'est possible». L’application, cependant, reste en développement.