France

Après un mois de conflit social, la Guyane poursuit la mobilisation

Le collectif «Pou la Gwiyann dékolé» a décidé de poursuivre la mobilisation en refermant les barrages qui avaient été levés pour le week-end, jusqu'à la signature d'un protocole d'accord avec le gouvernement.

Un protocole d'accord de sept pages, élaboré par le collectif «Pou la Gwiyann dékolé» qui coordonne le mouvement social «pour suspendre le mouvement sous sa forme actuelle», a été envoyé le 16 avril au gouvernement, qui en a accusé réception. 

«Pour avoir une signature rapide, nous avons obligation de durcir le mouvement. Les barrages seront fermés dès le 17 avril 22h (heure locale)», a déclaré pour le collectif Valérie Vanoukia, représentante des très petites entreprises de Guyane, à l'issue d'une assemblée générale, invitant la population à se remobiliser.

Dans ce protocole, baptisé Projet d'Accord de Guyane, «Pou la Gwiyann dékolé» (Pour que la Guyane décolle), «on met en œuvre le plan d'urgence de plus d'un milliard d'euros proposé par le gouvernement et on fait une proposition d'accord à minima, sur des compléments pour satisfaire les urgences», a-t-elle expliqué.

«Sur les deux milliards, nous pouvons discuter, [...] ce ne sont qu'une pompe d'amorçage», a-t-elle ajouté. 

Lire aussi : Blocage moins intransigeant que prévu en Guyane

Valérie Vanoukia a souligné notamment que dans le texte initial du gouvernement, les questions sur la santé, l'éducation, le foncier et les communes de l'intérieur n'avaient pas eu «de vraies réponses». Mais elle a déclaré que deux points étaient «non négociables». D'après Valérie Vanoukia, le gouvernement devait acter le fait que le peuple guyanais voulait se prendre en main et garantir qu'aucun manifestant ayant participé au mouvement ne serait sanctionné judiciairement.

«Nous acceptons la reprise du dialogue que le président de la République nous a proposée», a-t-elle fait savoir en précisant que «pour avoir une réponse rapide», le collectif «monterait la pression», juste avant le premier tour de l'élection présidentielle, prévu le 22 avril en Guyane.

La fermeture des barrages risque d'accentuer les divisions qui sont montées crescendo depuis plusieurs jours dans la population sur ce blocage qui paralyse la Guyane et pénalise l'activité économique. Au sein du collectif également, des divergences étaient apparues ces derniers jours, les socio-professionnels réclamant la levée des blocages pour «sauver les emplois». Selon le préfet, plus de 500 entreprises guyanaises ont déjà demandé des mesures de chômage partiel à cause du mouvement social. 

Le collectif avait déjà prévenu que le rond-point proche du centre spatial de Kourou, où s'effectuaient les lancements de la fusée Ariane, resterait fermé, malgré les alertes du PDG d'Arianespace sur les conséquences économiques et sociales de ce blocage.

Campagne perturbée 

Renforcement des moyens pour lutter contre l'insécurité, désenclavement de toutes les communes de Guyane, dont certaines sont inaccessibles par la route et n'ont ni eau potable, ni électricité, reconnaissance des peuples autochtones, amélioration des services de santé défaillants et du système scolaire inadapté à une démographie galopante... les manifestants réclament au total plus de trois milliards d'euros à l'Etat, alors que celui-ci a mis sur la table un plan d'urgence d'un milliard d'euros. 

«Quel que soit le gouvernement qui sera là, ce qu'on demande, il va être obligé de nous le donner», a déclaré le porte-parole du collectif, Mikael Mancée.

Depuis un appel à la «grève générale illimitée» le 25 mars, qui bloque notamment le port de Cayenne où transitent 90 à 95% des importations et exportations de la Guyane, le territoire souffre d'une pénurie dans les commerces, notamment de produits frais, et de difficultés d'approvisionnement de médicaments et de matériel médical. Mais les conséquences de la grève sont plus larges : services administratifs fermés, liaisons aériennes aléatoires, absence de courrier, campagne électorale perturbée. 

Lire aussi : Présidentielle: 50 000 policiers et gendarmes mobilisés, l'Intérieur n'exclut pas des «débordements»