Les derniers attentats perpétrés en France ont été le fait de personnes fichées et surveillées par les services de renseignements. Y a-t-il une faillite des services secrets français ?
- Le 19 avril 2015 : Sid Ahmed Ghlam. Il y a quelques semaines à peine, la France découvrait le visage de Sid Ahmed Ghlam. Un étudiant de 24 ans, féru d'informatique et discret. Il est soupçonné d'avoir pojeté des attentats dans des églises de la région parisienne. Il a été arrêté alors qu'il venait de tuer une mère de famille, qui était stationnée en voiture à proximité des lieux de culte visés. Il aurait reçu ses ordres de l'étranger, sans doute de Syrie.
Le jeune homme avait été repéré par les services français suite à ses déclarations sur Facebook laissant entendre qu'il souhait partir faire le djihad en Syrie. Il avait fait l'objet d'une «fiche S» de la part de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), et avait été discrètement surveillé. Si plusieurs membres de sa famille avait basculé dans l'islam radical, les policiers n'avaient pourtant rien trouvé d'inquiétant dans son «environnement» qui justifiait une enquête plus approfondie.
- 7-9 janvier 2015 : les attentats de Charlie Hebdo. Les assaillants du journal satirique, Saïd et Chérif Kouachi étaient eux aussi bien connus des services secrets. Repérés dès 2011, les deux frères avaient été tour à tour écoutés et suivis pendant de longs mois et ce jusqu'à l'été 2014. Notamment depuis que Washington avait alerté Paris sur les visites de l'ainé, Saïd, au Yemen. Les Kouachi revendiqueront d'ailleurs leur attaque au nom d'Al Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA). Les deux hommes sont donc parvenus à tromper les renseignements français, qui faute de preuves les avaient «débranchés».
Quant à Amédy Coulibaly, l'auteur des attentats de Montrouge et de l'Hyperchasher, il n'avait même pas été repéré par les renseignements. Etonnant, car le jeune homme frayait avec la mouvance salafiste radicale et avait même été condamné à 5 ans de prison pour avoir tenté de faire évader un islamiste notoire, auteur des attentats de 1995.
Confronté à de tels échecs, le procureur de Paris avait déclaré: «Nous sommes face à des individus venus de nulle part, adeptes de la taqiya - la technique islamiste de la dissimulation - et qui n'émettent que des signaux très faibles, quasiment indécelables par les services de renseignement ».
Les attentats de janvier ont fait 17 victimes en plus des 3 auteurs.
- Le 24 mai 2014 : le Français Mehdi Nemmouche attaque le Musée juif de Bruxelles et tue 4 personnes. Le jeune homme est arrêté quelques jours plus tard à Marseille lors d'un banal contrôle routier. Mehdi Nemmouche est un délinquant, un braqueur qui s'est radicalisé au cours de ses multiples séjours en prison, où il se fait remarquer par son prosélytisme. La direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) est alertée. Dès sa sortie de prison en 2012, l'homme rejoint les rangs de Daesh en Syrie. Il refait parler de lui lors de son retour en Europe en mars 2014 à Francfort où il est repéré par des douaniers allemands. Une fiche de surveillance «S» est établie à son nom. Il passe à l'acte moins de deux mois plus tard.
- Mars 2012 : les attentats de Toulouse et Montauban. Mohamed Merah, 24 ans, a été surnommé par les médias «le tueur au scooter». Cet islamiste a assassiné 7 personnes dont 3 enfants juifs, lors de plusieurs expéditions punitives effectué avec son scooter blanc. Il sera tué par la police après avoir tenu le siège de son appartement pendant près de 32 heures. Le cas de Mohammed Merah avait fait scandale, car les renseignements français avaient à l'époque songé à faire de Merah «une taupe» avant d'y renoncer. Dans une note datant du 25 janvier 2012 émanant de la DCRI on pouvait lire : «Mohammed Merah est apparu comme quelqu'un d'assez malin et ouvert qui pourrait présenter un intérêt pour notre thématique en raison de son profil voyageur. Néanmoins, le comportement et la fiabilité de Merah nécessitent d'abord une évaluation».