France

Décision de la CJUE sur le port du voile : Fillon se félicite, le CCIF s'inquiète de «crispations»

La décision de la Cour de justice de l'Union européenne de laisser aux entreprises privées le droit de décider de leur règlement interne en matière de neutralité religieuse a créé la surprise. La droite a été la première à réagir.

Le jugement de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), posant que les entreprises privées peuvent interdire à leurs employés de porter des signes ostentatoires religieux, dont le voile islamique, a pris de court la classe politique, notamment à gauche.

A droite, François Fillon s'est félicité d'un jugement «défendant la laïcité et marquant un coup d'arrêt au prosélytisme religieux». «En effet, poursuit-il, ce jugement souligne avec la plus grande clarté que la règle interne ou la charte d'une entreprise, interdisant le port visible de tout signe religieux, ne constitue pas une discrimination». Pour le candidat de la droite, qui se positionne sur une ligne conservatrice, la décision de la CJUE constitue un «facteur de cohésion et de paix sociales», en Europe comme en France.

Sur la même ligne, Nicolas Dupont-Aignan se félicite d'une décision de nature, selon lui, à stopper le «prosélytisme» religieux dans les entreprises.

Le député Rassemblement Bleu Marine (RBM) Gilbert Collard salue de son côté le jugement de la Cour européenne, avec le mot d'esprit du jour : «Même la CJUE vote Marine.»

Le CCIF et Amnesty international inquiets

Le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) a fait part de sa «profonde inquiétude», qualifiant le jugement de la cour de «permis de discriminer» offert aux entreprises à l'échelle européenne. Le collectif qui s'était illustré lors de la polémique du burkini pendant l'été 2016, dénonce un arrêt «porteur de très lourdes conséquences» qui témoigne selon lui de «crispations de certaines franges des sociétés européennes».

Amnesty International Europe déplore une décision «décevante», qui donne «toute latitude aux employeurs dans la discrimination des femmes – et des hommes – sur la base de [leurs] convictions religieuses».

Une position partagée par le Réseau européen contre le racisme (ENAR). «C'est une décision extrêmement préoccupante parce qu'elle écarte les femmes portant le voile du monde du travail», s'insurge le réseau financé à 80% par la Commission européenne.

Ce 14 mars 2017, la CJUE a jugé que «l'interdiction de porter un foulard islamique, qui découle d'une règle interne d'une entreprise privée interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, ne constitu[ait] pas une discrimination directe fondée sur la religion ou sur les convictions».

Cette décision pourrait entrer en conflit avec les législations nationales, dont, en France, la loi travail, dite aussi «loi El Khomri», imposée sans vote au parlement français à l'été 2016 et qui dispose que «la liberté du salarié de manifester ses convictions, y compris religieuses, ne peut connaître de restrictions que si elles sont justifiées par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché».

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