Jacques Toubon n'est pas fan du projet de loi sur la légitime défense des policiers. Dans un avis datant du 24 janvier, le Défenseur des droits juge qu’il «ne peut être considéré comme une réponse satisfaisante au malaise exprimé par les policiers».
S’il est définitivement validé, le texte alignera les conditions d'usage des armes à feu des policiers sur celles des gendarmes. Ils pourront alors faire feu en cas «d'absolue nécessité» en plus des situations de légitime défense.
De nombreuses organisations de policiers demandent une évolution de la législation. Les terribles incidents de Viry-Châtillon en octobre 2016 ont notamment motivé cette revendication. Une quinzaine d’agresseurs avaient incendié deux voitures de police brûlant grièvement deux agents. Une vague de mobilisation inédite avait ensuite déferlé à travers l’Hexagone.
Jacques Toubon vent debout
«La loi n'est pas le moyen adapté. Elle ne peut être utilisée uniquement comme un outil de management et les outils affichés ne peuvent justifier la modification d'une notion aussi essentielle que la légitime défense», a déclaré le Défenseur des droits.
Jacques Toubon met notamment en avant ce qu’il considère comme un manque de clarté du projet de loi. D’après lui, il «complexifie le régime juridique de l'usage des armes en donnant le sentiment d'une plus grande liberté pour les forces de l'ordre, au risque d'augmenter leur utilisation, alors que les cas prévus sont déjà couverts» par les textes actuels.
L’ancien Garde des Sceaux prend pour exemple le drame de Viry-Châtillon en le retournant en contre-argument contre le texte. Jacques Toubon estime qu’une fois adopté, le texte ne permettrait pas aux policiers d’avoir une «plus grande protection».
Doublement des peines en cas d’outrage à agent
Un autre point chagrine particulièrement le Défenseur des droits. Il s’agit du doublement des peines prévues pour outrage commis contre des dépositaires de l'autorité publique. Elles passeraient de six mois à un an d'emprisonnement et de 7 500 à 15 000 euros, voire deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros si l'outrage est commis en réunion.
Alors que le taux de réponse pénale pour ces faits atteint déjà 95,5%, l'aggravation des peines encourues, une mesure «avant tout symbolique», «apparaît non nécessaire et disproportionnée», explique-t-il. Elle risque en outre de «creuser le fossé déjà existant entre la force publique et la population».
Jacques Toubon souhaite également une clarification concernant le champ d'application d'un autre article du projet de loi, qui élargirait grandement la possibilité pour les forces de l'ordre de «rédiger des actes de procédure», «déposer» ou «comparaître» comme témoins anonymes.
Le texte sera examiné par l’Assemblée nationale à partir du 7 février. L’objectif affiché est une adoption définitive avant la clôture de la session parlementaire à la fin février.