En l'absence du nouveau ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux, le projet de loi sur la prolongation de l'état d'urgence jusqu'au 15 juillet a été approuvé par la majorité et l'opposition de la commission des lois. Seuls les écologistes non-inscrits présents en commission ont voté contre.
Les députés ont voté un seul amendement au projet de loi pour encadrer davantage la durée des assignations à résidence, qui n'étaient pas jusqu'ici limitées dans le temps.
Là où le gouvernement proposait de limiter l'assignation à résidence à «quinze mois consécutifs en l'absence d'éléments nouveaux de nature à justifier le maintien de la mesure», le rapporteur Pascal Popelin (PS) et le président de la commission des Lois Dominique Raimbourg (PS) ont fait voter une durée maximale de 12 mois, comme le préconise le Conseil d'Etat, mais avec une prolongation possible de trois mois renouvelable sur une décision du juge des référés du Conseil d’Etat.
«Il est indispensable d’établir solidement les motivations d’une assignation à résidence qui se prolongerait dans le temps au regard de la menace pour la sécurité et l’ordre publics que constitue le comportement de la personne», a expliqué Pascal Popelin, jugeant cette formulation «plus protectrice des libertés».
Dans leur rapport d'information sur un an d'état d'urgence présenté la semaine dernière, les deux responsables du contrôle parlementaire, Dominique Raimbourg et le député LR Jean-Frédéric Poisson soulignent que 95 personnes restaient soumises à une assignation à résidence à la date du 14 novembre, dont 47 depuis l'instauration de l'état d'urgence un an auparavant.
Pour ces personnes qui auront déjà atteint la durée d'un an à l'entrée en vigueur de la loi ou l'atteindront dans les trois mois suivants, le gouvernement pourra prolonger transitoirement leur assignation de trois mois avant de saisir le Conseil d'Etat.
L'assignation à résidence est l'une des mesures pouvant être prise au titre de l'état d'urgence avec les perquisitions administratives, les interdictions de cortèges, les contrôles d'identité et fouilles de bagages et de véhicules, les fermetures de lieux de réunion...
La durée record
Cette nouvelle prolongation, la cinquième depuis l'entrée en vigueur de l'état d'urgence au lendemain des attentats du 13 novembre, doit maintenant être votée dans l'hémicycle le soir du 13 décembre avant d'être débattue au Sénat le 14 et 15 décembre dans le but d'une adoption conforme.
Avec cette prolongation, la France connaîtra sa plus longue période d'état d'urgence depuis la création de ce régime législatif d'exception, hérité de la guerre d'Algérie et essentiellement appliqué au lendemain du putch des généraux (du 23 avril 1961 au 9 octobre 1962).
La prolongation jusqu'au 15 juillet permettra d'enjamber l'élection présidentielle d'avril-mai et les élections législatives de juin afin de laisser le soin à un nouveau gouvernement de décider (ou non) d'une sortie de l'état d'urgence.
Le projet de loi stipule d'ailleurs que la prolongation ne sera pas interrompue par les démissions du gouvernement suivant les élections.
«Cette période de campagne électorale, qui sera naturellement marquée par de nombreuses réunions publiques et rassemblements, peut aussi constituer malheureusement un contexte de risque d'attentat accru», avait souligné le 10 décembre le Premier ministre Bernard Cazeneuve en indiquant que douze tentatives d’attentats avaient été déjouées depuis l’attentat de Nice.