«C'est impressionnant», lâche tout sourire Manuel Valls, à l'entrée de l'hôtel Matignon, sans que l'on sache s'il s'adresse à son successeur Bernard Cazeneuve situé près de lui ou aux journalistes alentours, en prélude de son discours de passation de pouvoir du mardi 6 décembre. «Détendez vous, détendez vous», continue-t-il, alors que l'ex-ministre de l'Intérieur s'apprête à le remplacer au poste de chef du gouvernement.
«Matignon, c'est une belle et grande maison [...], une maison où l'on fait beaucoup, beaucoup de choses», confie avec une certaine familiarité celui qui a été Premier ministre pendant plus de deux ans.
Au cours d'une intervention solennelle d'environ cinq minutes, le désormais ex-locataire de Matignon semble tenir à rassurer son successeur, affirmant par exemple qu'il a été «un Premier ministre heureux», et qu'«il n'y a pas d'enfer à Matignon». D'humeur résolument enjouée, l'ancien chef de gouvernement évoque même, en parlant de son mandat, «des moments de joie, de plaisir»... et pas uniquement la demi-finale de l'Euro de foot (remportée par les Bleus contre l'Allemagne), précise-t-il, avant d'ajouter à l'adresse de son collègue : «Et je sais votre amour pour le ballon rond !»
Cher Bernard Cazeneuve, nous commençons à avoir l'habitude des passassions de pouvoir
Puis, à l'approche de la fin de son discours, Manuel Valls se permet de plaisanter sur la similarité des parcours suivis par son successeur et par lui-même (tous les deux accédant à Matignon depuis la Place Beauvau) : «Cher Bernard Cazeneuve, nous commençons à avoir l'habitude des passassions de pouvoir ; vous avez pris l'habitude de me succéder.»
Et de conclure avec une note émouvante : «Je pars donc avec une forme de gravité bien sûr, mais aussi de légèreté : vous êtes un ami, vous êtes un frère. C'est rare en politique.» Des mots d'une rare chaleur, qui seront parvenus à arracher un (léger) sourire à l'austère Bernard Cazeneuve.