France

L’Assemblée nationale adopte la loi renseignement

Les députés de l’Assemblée nationale ont adopté la loi renseignement controversée en première lecture. 438 élus ont voté pour, 86 contre. Le Sénat examinera le projet de loi en juin.

Pour empêcher d’autres actes terroristes, le texte élargit les prérogatives des services de renseignements et la pratique des écoutes. L’installation de «boîtes noires» chez les opérateurs de télécommunications, qui permettrait la collecte systématique des données de connexion, est le motif principal de la levée de boucliers.

Le temps est compté pour les opposants au projet qui comptent rallier le plus de voix possibles dans l'Hémicycle et dans la société toute entière. Pour les militants d'Amnesty international, le grondement des manifestants sur l'esplanade des Invalides ne suffira pas, il faut se préparer au pire : «Je n’envisage même pas que le projet soit appliqué. On a déjà enclenché les contacts au Sénat pour faire passer des amendements si l’Assemblée Nationale ne vote pas contre», a confié à Rue 89 une activiste présente au rassemblement de dimanche.


A l’avant-garde des combats pour la liberté d’Internet, les activistes d’Anonymous appellent à une «mobilisation générale contre une loi qui menace nos libertés».

Le peuple français, en un temps record, a répondu à l'appel. Une pétition de 119 244 signatures a été envoyée au Premier ministre Manuel Valls pour demander le retrait immédiat du projet de loi, les signataires ne voulant pas d'un «Etat policier numérique». Une autre pétition de 800 acteurs du numérique intitulée «Ni pigeons, ni espions» donne le même son de cloche.

La mobilisation s'organise aussi au sein des corps professionnels, et notamment chez les juristes qui sont les premiers concernés, le Bâtonnier de Paris s'insurgeant contre «une ingérence inacceptable dans la vie privée».

Facile de parler pour ceux qui n'ont pas été victimes du terrorisme? Peut-être, et pourtant. L’Association française des victimes du terrorisme, par la voix de son directeur général Guillaume Denoix de Saint-Marc, met en garde : «On ne voudrait pas que, sous prétexte de lutter contre le terrorisme, on ait une loi trop liberticide».

Au Front national, Marine Le Pen a également fait de la lutte contre les lois liberticides un de ses chevaux de bataille, denonçant lors de son discours du 1er mai une loi «anti-démocratique et attentatoire aux libertés individuelles».

Une fois n'est pas coutume, le Parti de Gauche donne dans la même rhétorique que ses ennemis jurés d'extrême droite : «Non à l’espionnage généralisé !», les troupes de Mélanchon ont-elles scandé sur les réseaux sociaux.

Enfin, si plus rien ne marche, il faudra s'en remettre à l'avis des sages. C'est tout du moins ce qu'est déterminée à faire la député UMP Laure de La Raudière, qui a annoncé qu’elle proposerait une saisine parlementaire du Conseil constitutionnel, craignant que la «loi renseignement» ne vienne «généraliser la surveillance de masse».