Le Président français justifie sa présence dans la capitale qatarie, accompagné du ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius et du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian par ces mots : «c'est d'abord parce qu'il y a une longue tradition, et ensuite parce que la France est regardée comme un pays fiable, à qui il est possible de donner sa confiance pour un pays partenaire».
Un «pays partenaire» dont il convient d’apprécier la stratégie d’influence auprès d’acteurs économiques et de certaines communautés présentes en France.
Depuis son élection en 2012, François Hollande s’est rendu quatre fois au Qatar. Le premier chef d’Etat qu’il a reçu à l’Elysée est son émire, «un évènement qui illustre l’importance pour Hollande de l’Emirat du Golfe persique, mesurant à peine la taille de la Corse», a signalé le Gatestone Institute, think tank de politique internationale.
Cette relation spéciale existe cependant depuis plus longtemps. Le Qatar a pris des parts dans de nombreux fleurons de l’économie française : dans Louis Vuitton Moët Hennessy, champion mondial de l’industrie du luxe, dans l’énergie avec Total, dans les medias avec Lagardère. Ainsi, des fonds qataris possèdent 13% du groupe Lagardère, qui détient 7,5% d’EADS, la compagnie mère d’Airbus, numéro 1 mondial de l’aviation commerciale.
Des investisseurs qataris s’offrent aussi de grands noms de l’hôtellerie de luxe, par exemple les hôtels Carlton et Martinez à Cannes, ou les prestigieux Concorde Lafayette et hôtel du Louvre à Paris. Autre achat hautement symbolique - le club de football Paris Saint-Germain est également passé sous la bannière de l’Emirat en 2011. Son logo a ainsi dû être modifié, en gommant le berceau et la fleur de lys, références à la royauté chrétienne.
Plus inquiétante encore est la stratégie d’influence envers les banlieues. Sous la présidence de Nicolas Sarkozy, le Qatar avait annoncé sa volonté d’investir 50 millions d’euros dans les banlieues françaises ou vit la «grande majorité des six millions d’immigrés musulmans en France» selon les mots du Gatestone Institute, somme ensuite doublée à 100 millions d’euros. Selon ces mécènes, les fonds sont notamment destinés à combattre la pauvreté en Seine-Saint-Denis. Des émeutes y ont éclaté en 2005 après la mort de deux adolescents dans une course poursuite avec la police à Clichy-sous-Bois. Les violences se sont alors étendues dans de nombreuses banlieues françaises avec plus 10 000 véhicules incendiés et près de 3000 arrestations.
Le spécialiste du Moyen Orient Karim Sader explique à France 24 : «Nous sommes tentés de lier ces fonds pour les banlieues aux penchants islamistes du Qatar, étant donné le rôle de ce pays dans le financement des Printemps arabes et des Frères musulmans». Marine Le Pen avait alors dénoncé un «Cheval de Troie de l’islamisation».
La vente des Rafale est loin d’être un coup d’essai de la coopération politique et militaire franco-qatarie. Dans le sillage des «printemps arabes», la France et le Qatar ont fait œuvre commune en Libye et en Syrie. Alors que l’émirat a financé les mouvements islamistes, la France a été le fer de lance de la campagne de bombardements sur la Libye et a prôné cette même solution contre Damas.