L'affaire a commencé en octobre 2014 après qu'un jeune homme, employé en période d'essai dans un salon de coiffure parisien, a reçu un SMS par erreur. Envoyé par inadvertance par sa manager, le texto disait : «Je ne garde pas [l'employé], je le préviens demain [...] je ne le sens pas ce mec : c'est un PD, ils font tous des coups de putes», selon les faits relatés par le jugement du 16 décembre 2015, consulté le 8 avril par l'AFP.
Le lendemain, le jeune homme se présentait sur son lieu de travail et ses responsables lui signifiaient l'interruption de sa période d'essai.
S'estimant victime de discrimination liée à son orientation sexuelle et se disant très affecté psychologiquement, il a attaqué son employeur devant les prud'hommes, soutenu par le Défenseur des droits, qui estimait qu'il y avait bien eu discrimination.
Le salon de coiffure faisait valoir pour sa part que l'employé travaillait lentement, avait des difficultés d'intégration et refusait d'exécuter certaines tâches. Tout en reconnaissant le caractère et la teneur inappropriés du SMS, l'employeur estimait que le terme de PD n'est qu'un simple abus de langage et que ce terme est entré dans le langage courant et qu'il n'a aucun sens péjoratif ou homophobe dans l'esprit de la manager.
Dans sa décision, le conseil des prud'hommes a repris les arguments de l'employeur en justifiant : «En se plaçant dans le contexte du milieu de la coiffure, le Conseil considère que le terme de PD employé par la manager ne peut être reconnu comme propos homophobe, car il est reconnu que les salons de coiffure emploient régulièrement des personnes homosexuelles, notamment dans les salons de coiffure féminins, sans que cela ne pose de problèmes.»
Le conseil considère que «l'employeur n'a pas fait preuve de discrimination [...] mais que ce sont des propos injurieux qui ont été prononcés». Il a accordé à l'employé 5 000 euros de dédommagement au titre du préjudice moral. «Le jeune homme a fait appel», a précisé à l'AFP Slimane Laoufi, chef du pôle «emploi privé» chez le Défenseur des droits.
Le jugement a outré les associations LGBT. Nicolas Noguier, président et fondateur du Refuge, qui héberge et accompagne des jeunes victimes d'homophobie ou de transphobie, est scandalisé. Pour lui, cette décision de justice est clairement homophobe et véhicule des clichés tels que : «Les coiffeurs pour dames sont des pédés.»
Outrée, la ministre du Travail n'a, elle aussi, pas tardé à réagir, qualifiant ce jugement de «scandaleux et choquant».