France

Le Conseil de l'Europe s’inquiète des dérives de l’état d’urgence en France, Paris conteste

Le commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe juge dangereuses pour la démocratie les mesures mises en place en France dans la foulée des attentats de novembre, et la soupçonne de profilage ethnique, ce que dément Stéphane Le Foll.

«Nous regardons de très près ce qui se passe en France, car il y a un risque que le système de contrôle démocratique soit sapé par ces mesures, qui permettent notamment aux policiers de procéder à des perquisitions sur décision du pouvoir exécutif, et non plus d'un juge», a affirmé Nils Muiznieks dans une interview à la radio France Culture.

Selon lui, l'état d'urgence instauré en France après les attentats djihadistes du 13 novembre donne lieu à des dérives et présente un risque pour la démocratie. Il critique notamment les milliers de perquisitions dont seule une poignée d'entre elles auraient donné lieu à des procédures liées à des actes terroristes, ce qui selon lui pose «la question de la nécessité de ces mesures».

«Nous assistons à certaines dérives, il y a des pratiques de profilage ethnique de la part des agents de police, des forces de répression», dénonce -t-il.

Une accusation que le porte-parole du gouvernement n'a pas tardé à contester, affirmant que ces critiques sont «absolument contraires à ce qui s'est passé».

Aller plus loin : Bernard Cazeneuve estime avoir pris «toutes les précautions» depuis 2013

«L'état d'urgence répondait à une nécessité : je rappelle que nous étions le soir du 13 novembre, lorsqu'il a été proposé par le Premier ministre et accepté par le président de la République à minuit, dans une situation où se déroulait encore au Bataclan la prise d'otages», rétorque Stéphane Le Foll, précisant qu'en ce qui concerne les perquisitions, «lorsqu'il y a eu quelques éléments de discussion, Bernard Cazeneuve a fait un courrier pour rappeler les règles dans lesquelles cela devait s'appliquer».

«Ce que dit Nils Muiznieks est révélateur d’une inquiétude que bon nombre d’observateurs partagent », tranche Henri Labayle, professeur de droit à l’université de Pau contacté par RT France. «Il est clair qu’aujourd’hui, en ce qui concerne la recherche de terroristes soutenus par Daesh, ce ne sont pas des danois qui sont en première ligne, donc il y a indéniablement des considérations ethniques qui jouent dans le choix des perquisitions». 

Pour cet expert du droit, l’échéance proche du mois de février, date à laquelle sera décidé si l’état d’urgence est prolongé ou abandonné, ravive le débat. Selon lui, le recours à l’état d’urgence deux mois après le drame du 13 novembre demande de faire un bilan qualitatif. «La vraie question que l’on devrait se poser, c’est est-ce que ces attentats auraient pu être empêchés s’il y avait eu l’état d’urgence. Rien n’est moins sûr. Il faut se demander si l’état d’urgence n’est pas devenu un outil de communication pour rassurer une population traumatisée» conclut-il.