Y aura-t-il des cadeaux Shein sous les sapins français ? Le tribunal judiciaire de Paris doit trancher, le 19 décembre après-midi, sur la demande de l’État visant à suspendre pour trois mois la plateforme asiatique d’e-commerce, accusée d’avoir vendu des produits interdits. Une décision très attendue par les consommateurs, alors que le géant de la mode à bas prix figure parmi les sites les plus fréquentés en France.
À l’origine de la procédure, la découverte sur la plateforme de produits jugés gravissimes : poupées sexuelles à l’apparence de fillettes, armes de catégorie A et médicaments interdits. Face à ces manquements, l’État a réclamé une mesure radicale : le blocage du site, assorti de conditions strictes pour toute réouverture. À défaut, les autorités exigent a minima le maintien de la suspension de la marketplace qui héberge les vendeurs tiers, ainsi que l’arrêt de toutes les ventes hors habillement.
D'autres plateformes sur la sellette
Shein, fondé en Chine et basé à Singapour, dénonce une « cabale » politique et médiatique. Lors de l’audience du 5 décembre, ses avocats ont insisté sur la réactivité du groupe, affirmant que les produits litigieux ont été retirés dès leur signalement. La plateforme a d’ailleurs suspendu elle-même sa marketplace en France et ne commercialise plus que ses propres vêtements, le temps de mener un « audit complet » et de corriger les « failles » de ses systèmes de contrôle.
Ces mesures ont pesé dans l’analyse du ministère public, qui s’est opposé à un blocage total jugé disproportionné au regard de la jurisprudence européenne. Le parquet a toutefois rappelé que le rôle du tribunal est aussi de « prévenir un dommage futur ». L’État demande donc des garanties durables : filtrage renforcé des produits, contrôle efficace des vendeurs et mise en place d’un filtre d’âge pour empêcher l’accès des mineurs à des contenus pornographiques, sous la supervision de l’Arcom.
Même en cas de rejet de la demande de l’État, Shein prévient que la reprise sera progressive. Le groupe reconnaît notamment des difficultés techniques à instaurer un filtrage d’âge fiable, ce qui maintiendrait fermée la catégorie adulte, déjà suspendue au niveau mondial.
Quelle que soit l’issue judiciaire, le dossier est loin d’être clos. Une enquête pénale est en cours à Paris, confiée à l’Office des mineurs. Elle concerne aussi AliExpress, Temu, Wish ou eBay. « Ce qui s’appliquera à Shein s’appliquera aux autres plateformes », a averti le ministre du Commerce, évoquant un « long combat ». Un combat également européen, alors que le règlement sur les services numériques (DSA) est jugé insuffisant face à l’afflux quotidien de millions de colis échappant aux contrôles.