France

Ary Abittan : l’affaire qui embarrasse l’Élysée

Brigitte Macron, en qualifiant de «sales connes» des militantes féministes qui ont perturbé un spectacle d’Ary Abittan, ravive la polémique autour de l’humoriste accusé de viol et bénéficiaire d’un non-lieu. La femme du président se trouve au milieu d’une polémique qu’elle a créée toute seule.

Des mots « blessants » qui « amplifient [son] traumatisme » : la plaignante qui accuse de viol l’humoriste Ary Abittan a réagi aux propos polémiques de Brigitte Macron.

Cette dernière avait qualifié de « sales connes » des militantes féministes qui avaient interrompu le spectacle de l’humoriste. La polémique remet en lumière un dossier judiciaire clos mais contesté, exposant les contradictions de l’exécutif sur la lutte contre les violences sexuelles.

Les déclarations de la femme du président ont été largement critiquées dans la presse. Le Nouvel Obs s’interroge : « Que s’est-il passé dans la tête de Brigitte Macron ? », tandis que Libération a publié plusieurs papiers critiques sur le sujet, dont un billet d’humeur intitulé « Brigitte Macron et Ary Abittan : soyons toutes des “sales connes” ».

Les réactions politiques ont été globalement unanimes, avec une critique des propos de Brigitte Macron. À gauche, la députée NFP Clémentine Autain a déploré : « Emmanuel Macron avait annoncé que l’égalité femmes-hommes serait sa grande cause nationale. Il n’en a rien été. Maintenant, c’est Brigitte Macron qui insulte des féministes. »

À droite, la présidente de l’organisation féministe Némésis, Alice Cordier, s’est indignée : « C’est au mieux une “erreur” de communication grave, au pire un crachat au visage des femmes », rappelant l’aspect troublant du traitement judiciaire de l’humoriste.

Accusé de viol en 2021 par une jeune femme de 22 ans, Ary Abittan, âgé de 47 ans, a obtenu un non-lieu en avril 2024, confirmé en appel. L’ordonnance, consultée par Le Monde, note des lésions vaginales et anales compatibles avec une pénétration non consentie, des messages de la plaignante évoquant douleur et humiliation, ainsi qu’un état de stress post-traumatique. Pourtant, l’appareil judiciaire conclut à l’absence d’« indices graves ou concordants », pointant l’« équivocité » des signaux de la victime et le profil « respectueux » d’Abittan selon ses proches.

La plaignante, anonyme sous le prénom Camille, brise le silence dans Le Monde : « “Sales connes”, ces mots violents ravivent des souffrances profondes », confie-t-elle, saluant les militantes qui l’ont aidée dans sa reconstruction. À 27 ans, elle mène une vie « monacale », loin des réseaux, chaque rappel de l’affaire ravivant son traumatisme. Son appel du non-lieu a été rejeté.

Les critiques sont d’autant plus amplifiées qu’une archive d’un baiser forcé par Abittan sur un plateau télévisé a ressurgi, rappelant le comportement de l’animateur Arthur, également mis en cause par les féministes pour un comportement analogue.

Pour les féministes, les mots de Brigitte Macron découragent les victimes dans un pays où 96 % des plaintes pour viol sont classées sans suite. L’Élysée, muet, voit sa crédibilité entamée, dans un contexte de hausse des violences sexuelles en France, notamment dans les transports, mais aussi à travers des faits divers tragiques.