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France : mobilisations agricoles en Ariège contre l’abattage pour dermatose

En Ariège, des heurts ont opposé agriculteurs et forces de l’ordre lors d’une mobilisation contre l’abattage d’un troupeau de 207 vaches touché par un cas de dermatose nodulaire contagieuse.

Les tensions nocturnes entre manifestants et gendarmes les 11 et 12 décembre ont été marquées par des jets de projectiles et l’usage de gaz lacrymogènes, illustrant la colère des agriculteurs face à la décision d’abattre un troupeau entier pour un seul cas de dermatose nodulaire contagieuse (DNC), malgré des propositions alternatives de vaccination. Le retour des mobilisations agricoles inquiète l’exécutif qui tente de réprimer promptement le mouvement.

Depuis l’annonce, le 10 décembre, d’un cas de dermatose nodulaire contagieuse dans une ferme des Bordes-sur-Arize, des centaines d’agriculteurs se sont mobilisés pour bloquer l’accès aux services vétérinaires. Au pic de la mobilisation, jusqu’à 500 personnes, issues de la Coordination rurale (CR), de la Confédération paysanne et de sympathisants, ont protesté pacifiquement. Mais le 11 décembre au soir, la situation a dégénéré : feux de bottes de foin, jets de projectiles contre grenades lacrymogènes et de désencerclement.

« On est fous dans ce pays ! On vous nourrit, et regardez ce qu’ils nous font », s’est exclamé Sébastien Durand, président de la CR Ariège, au milieu des affrontements.

La préfecture a indiqué que les deux frères propriétaires avaient donné leur accord pour l’abattage, mesure sanitaire obligatoire. Cette affirmation est contestée par Pierre-Guillaume Mercadal, de la CR Tarn-et-Garonne : « Ils sont deux frères, un a cédé, l’autre non. Ils sont en train de déchirer cette famille. » Quatre interpellations ont eu lieu, dont une garde à vue pour participation à un groupement violent, selon le parquet de Foix.

Le ministre de l’Intérieur, Laurent Nuñez, a évoqué « 500 manifestants, dont des militants d’ultragauche », sans blessés rapportés. L’abattage, « seule méthode efficace » selon le préfet, devrait intervenir le 12 décembre, suivi d’une campagne de vaccination départementale. Déjà 3 000 des 33 000 bovins ariégeois ont été vaccinés près des foyers des Pyrénées-Orientales.

Les syndicats avaient proposé un protocole expérimental au ministère, limitant l’abattage aux bêtes contaminées, mais en vain.

La mobilisation s’étend : blocages sur l’A75 en Aveyron et Lozère, déversements de fumier à Agen, Périgueux et Bordeaux. Dans les Hautes-Pyrénées, un autre troupeau de 20 bêtes est menacé à Luby-Betmont. « Les actions vont monter crescendo. Maintenant, l’objectif, c’est Paris », prévient Éloi Nespoulous, président de la CR Occitanie.

De son côté, la FNSEA, premier syndicat agricole de France mais en recul lors des dernières élections et réputé proche des grands groupes agroalimentaires, a renoncé à défendre les éleveurs et se félicite sur son compte d’être parvenue à « l’élargissement de la zone vaccinale contre la DNC ».

Sur les réseaux sociaux, les réactions fusent. L’avocat et chroniqueur Charles Consigny dénonce : « Je suis un peu surpris qu’on envoie de tels détachements de forces de l’ordre aux agriculteurs… On ne les a pas pour liquider les points de deal dans les banlieues, mais on les a pour liquider les agriculteurs ! »

Les scènes de contestation et la répression très rapide des autorités rappellent ici les violences d’État dans le cadre des mobilisations des Gilets jaunes. Le ministre du Commerce, Serge Papin, insiste : « La solution, c’est le vaccin. » Reste que la détresse des éleveurs, face à une maladie sous contrôle selon le ministère, alimente un mouvement national qui pourrait être l’étincelle qui relance les manifestations paysannes.