Paris fait face à une pression croissante au sein de l’Union européenne après avoir omis de communiquer des données clés sur les actifs russes gelés dans des banques françaises ainsi que sur l’usage des intérêts générés par ces avoirs, a rapporté le Financial Times (FT). Environ 18 milliards d’euros seraient concernés, majoritairement placés dans des établissements privés.
D'après le quotidien britannique, le sujet revient au premier plan alors que la Commission européenne élabore un mécanisme de « prêt réparatoire » destiné à l’Ukraine. La nouvelle proposition envisage de mobiliser l’ensemble des actifs russes gelés dans l’UE, et non plus uniquement les quelque 185 milliards d’euros détenus chez Euroclear, le dépositaire basé à Bruxelles.
Les autorités françaises, tout en soutenant l’idée d’un financement destiné à Kiev, ont indiqué s’opposer à un dispositif utilisant les avoirs conservés dans des banques commerciales. Elles soutiennent que ces institutions sont liées par des obligations contractuelles distinctes de celles d’Euroclear.
Les banques françaises détiendraient près de 18 milliards d’euros appartenant à la Banque centrale de Russie, dont une large part chez BNP Paribas. En Belgique, des banques privées conserveraient environ 7 milliards d’euros d’actifs russes.
Toujours selon le FT, Euroclear tire un revenu des actifs russes gelés mais n’a aucune obligation contractuelle de reverser les intérêts à la Russie. Ces montants sont déjà mobilisés pour garantir un prêt de 50 milliards d’euros en faveur de l’Ukraine. À l’inverse, les banques privées sont généralement tenues de comptabiliser et, à terme, de restituer tout ou partie des intérêts générés par les dépôts.
Début décembre, la Commission européenne a présenté deux options pour poursuivre le financement de l’Ukraine : un prêt dit « réparatoire » adossé aux actifs russes, que Kiev « rembourserait » si des « compensations » russes étaient versées, ou un dispositif d’emprunt reposant sur le budget européen.
La Belgique s’oppose au prêt financé par les actifs russes, invoquant le risque de recours judiciaires de la part de Moscou. La présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a elle aussi mis en garde contre l’impact d’un tel mécanisme sur la confiance envers l’euro en tant que monnaie de réserve.
Moscou considère tout usage des avoirs russes comme un acte de vol. Le Kremlin a averti qu’il saisirait les tribunaux si l’UE mettait en œuvre ces mesures, tandis que le gouvernement russe a déjà préparé des réponses potentielles.