L’échec, prévisible, de la commission mixte paritaire (CMP) sur le budget de la Sécurité sociale souligne les fractures parlementaires profondes en France entre l’Assemblée nationale, marquée par des compromis avec la gauche, et un Sénat dominé par la droite. La Chambre haute a restauré une version plus austère du budget, incompatible avec les aspirations de la Chambre basse. Les députés recevront le texte dès le 29 novembre, avant un examen en hémicycle le 2 décembre.
Le Sénat avait adopté plus tôt dans la journée du 26 novembre sa version du PLFSS par 196 voix contre 119, ramenant le déficit à 17,6 milliards d’euros, proche de l’objectif initial du gouvernement (17,5 milliards). Les sénateurs ont supprimé des mesures phares votées à l’Assemblée, comme la hausse de la CSG sur les revenus du capital (2,8 milliards d’euros) ou la suspension de la réforme des retraites, concession clé du Premier ministre Sébastien Lecornu pour éviter une censure des socialistes.
Cette décision a provoqué des réactions contrastées. Le ministre du Travail, Jean-Pierre Farandou, a salué le « souci de sérieux budgétaire » du Sénat, tout en reconnaissant qu’il reste « du chemin avant d’aboutir à une copie définitive et équilibrée ».
Du côté des parlementaires, la sénatrice LR Corinne Imbert a vanté un budget « responsable », tandis que sa collègue socialiste Annie Le Houérou a déploré un texte qui « rétablit les horreurs » tempérées par les députés. Sur les réseaux sociaux, les réactions fusent. Le député PS Jérôme Guedj a fustigé le Sénat, qui « n’a pas souhaité rentrer dans le jeu du compromis », affirmant que « le dernier mot reviendra à l’Assemblée nationale ».
Le député LFI Hadrien Clouet a ironisé sur un texte sénatorial « encore pire » que celui du gouvernement, dénonçant une « ligne très réactionnaire ».
La gauche, qui a voté contre au Sénat, espère rétablir ces mesures en nouvelle lecture, tandis que le groupe macroniste s’est abstenu, craignant de fragiliser un compromis. Le gouvernement, ayant renoncé au 49.3, mise sur une navette parlementaire pour équilibrer le déficit à 20 milliards maximum. Mais les tensions persistent : les socialistes hésitent à voter le texte, et des grèves de médecins libéraux sont annoncées pour janvier, face à un risque de crise de trésorerie.
Cette impasse sur la « Sécu » précède l’examen du budget de l’État au Sénat, où la droite vise à limiter les prélèvements et à amplifier les économies. Une semaine décisive s’annonce, avec le PLFSS comme test pour la stabilité du gouvernement Lecornu.