En Nouvelle-Calédonie, la ministre des Outre-mer Naïma Moutchou débute ce lundi 10 novembre un déplacement sous haute tension. Arrivée à la tête du ministère à la mi-octobre, elle hérite d’un dossier explosif : un territoire exsangue économiquement et profondément divisé politiquement.
Appelée par un Premier ministre, Sébastien Lecornu, qui rassure les loyalistes mais crispe les indépendantistes, la ministre doit tenter de sauver un projet institutionnel, l’accord dit de Bougival, signé en juillet, censé déboucher sur la création d’un futur État de Nouvelle-Calédonie. Présenté trop vite comme « historique », l’accord est désormais rejeté par le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), qui le juge contraire au droit à l’autodétermination.
De moins en moins de confiance
Le report des élections provinciales, validé par le Conseil constitutionnel, offre un répit jusqu’en juin 2026 pour relancer les discussions. Mais le FLNKS, divisé et fragilisé depuis l’échec de Bougival, réclame un « dialogue sincère » et n’accepte de discuter que d’un État souverain de Kanaky, sous accompagnement onusien.
L’État, lui, teste l’idée d’une consultation anticipée sur Bougival, défendue par les loyalistes, mais jugée risquée par les modérés et par Manuel Valls, qui y voit un possible « passage en force ». Sur fond de dette abyssale, 360 % du PIB dû à Paris, et d’un territoire privé de 13 % de sa richesse, l’urgence est palpable.
Dans un FLNKS fragmenté entre radicaux et réformistes, l’unité du monde kanak vacille, tandis que la tentation de la rupture grandit. Le Palika, promoteur de Bougival, débat même d’un éloignement du mouvement. Face à cette mosaïque de positions, Naïma Moutchou tente de « retisser la confiance » via des rencontres bilatérales, mais sans illusion : entre l’idée d’un référendum risqué et celle d’un nouvel accord encore à inventer, Paris avance sur une ligne de crête, redoutant le retour des violences qui ont secoué l’archipel en mai dernier.