Le 20 octobre, la commission des Finances de l’Assemblée nationale a procédé à l’examen du volet « recettes » du budget 2026. Dès le premier jour, les députés n’ont pas hésité à corriger le gouvernement lui-même, adoptant, parfois avec le concours de députés de la majorité, des amendements modifiant la copie initiale.
L’un des moments les plus symboliques de la matinée a été le rejet net de l’amendement dit « taxe Zucman » : les députés n’ont pas retenu l’idée d’un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine global (y compris professionnel) des contribuables détenant au moins 100 millions d’euros. Le rejet a été porté par les voix de la majorité et du Rassemblement national.
Cette proposition, portée par les quatre groupes de gauche (LFI, PS, écologistes, communistes), visait à instaurer une forme de « minimum de justice fiscale ». Mickaël Bouloux (PS) a insisté sur le fait que les retraités, les classes moyennes, les chômeurs ou les malades ne devaient pas porter seuls l’effort fiscal, tandis que les plus fortunés échappaient à tout impôt plancher. De son côté, Eva Sas (écologiste) a dénoncé l’exception faite aux très riches, la jugeant insoutenable.
En face, l’exécutif et ses soutiens ont multiplié les critiques. Le rapporteur général Philippe Juvin (LR) a décrit l’amendement comme un « repoussoir pour les nouveaux entrepreneurs », craignant que cette taxe ne décourage l’initiative.
La gauche lésée
Jean-Philippe Tanguy (RN) a, pour sa part, mis en garde contre « une vague de désindustrialisation » si les biens professionnels étaient taxés sans nuance. L’un des reproches majeurs adressés aux partisans de la taxe portait sur le manque de précision concernant l’imposition des actifs professionnels.
Même si le rejet en commission constitue un revers pour la gauche, la bataille budgétaire n’est pas terminée. Le texte sera débattu dans l’hémicycle dès le 24 octobre, dans un format où les députés repartiront du texte initial du gouvernement (et non de la version amendée). L’amendement pourra être redéposé et soumis au vote, conformément à la logique habituelle des projets de loi de finances.
Par ailleurs, ce premier palier d’examen est marqué par l’ampleur du nombre d’amendements déposés : environ 1 400 amendements seront étudiés pendant ces trois jours consacrés aux recettes, afin de jauger les rapports de force et de tester les lignes rouges. Le calendrier est contraint : le vote solennel du budget est fixé au 4 novembre, tandis que la fenêtre constitutionnelle de 70 jours impose une adoption avant le 23 décembre au plus tard. En cas d’échec, le recours aux ordonnances ou à une loi spéciale n’est pas exclu.
Ce rejet symbolique de la « taxe Zucman » en commission rappelle les tensions structurelles entre ambition fiscale de justice sociale et souci (réel ou rhétorique) de compétitivité économique et de stabilité pour les hauts patrimoines. Il marque aussi un coup d’arrêt provisoire à une proposition souvent portée comme un étendard par la gauche, tout en soulignant que l’enjeu fiscal des très grandes fortunes sera au cœur des débats jusqu’à l’adoption finale du budget.