Le Premier ministre suggère une pause temporaire dans la réforme des retraites, visant à repousser l’âge légal de départ de 62 à 64 ans d’ici à 2030. Adoptée en avril 2023 et appliquée depuis septembre, cette réforme, portée par Élisabeth Borne, augmente progressivement l’âge de départ d’un trimestre par an pour les personnes nées en 1961, atteignant 64 ans pour celles nées en 1968.
Elle étend également la durée de cotisation requise pour une retraite à taux plein de 168 trimestres (42 ans) à 172 trimestres (43 ans) d’ici 2027. Selon Sébastien Lecornu, une suspension maintiendra l’âge actuel à 62 ans et 9 mois, en vigueur depuis le 1er septembre 2025, jusqu’au 1er janvier 2028, alors qu’il devait grimper à 63 ans en 2026, puis 63 ans et 3 mois en 2027.
Une réforme simplement suspendue
Par ailleurs, la durée d’assurance restera fixée à 170 trimestres durant cette période, a-t-il précisé. Cette mesure, accueillie favorablement par le Parti socialiste et la CFDT, ne revient pas sur la réforme et ne rétablit pas le départ à 62 ans.
Annie Jolivet, économiste au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), souligne que cette suspension gèle temporairement le processus, reportant les ajustements sans en changer la trajectoire ni le rythme après 2028. Depuis septembre 2023, la réforme a déjà ajusté l’âge à 62 ans et 3 mois pour les nés entre septembre et décembre 1961, 62 ans et 6 mois pour 1962, et 62 ans et 9 mois pour 1963.
Si cette mesure est adoptée, elle avantagera les générations nées à partir de 1964 : celles de 1964 partiront trois mois plus tôt (62 ans 9 mois au lieu de 63 ans) en octobre 2026, et celles de 1965 six mois plus tôt, avec un bénéfice pour 1966, 1967 et 1968 si le calendrier reprend ensuite.
Sébastien Lecornu estime que 3,5 millions de Français en profiteront, avec un coût de 400 millions d’euros en 2026 et 1,8 milliard en 2027, compensable par des économies. La Cour des comptes avait toutefois chiffré à 13 milliards d’euros le coût d’un arrêt à 63 ans en 2035, dont 5,8 milliards de déficit des retraites et 7,2 milliards de pertes fiscales.
Cette suspension entraînera des dépenses supplémentaires, car des salariés partiront plus tôt, anticipant les pensions, explique Jolivet, bien que l’impact reste limité. Elle note toutefois un risque de surcharge pour les caisses de retraite et de perturbation pour les employeurs face à des départs imprévus, décalant les plans issus de la réforme de 2023.