France

La «stratégie climat» de TotalEnergies sous le feu de la justice

TotalEnergies sera jugé le 5 juin à Paris pour «pratiques commerciales trompeuses». Trois ONG accusent le géant pétrolier de «greenwashing», dénonçant une communication mensongère sur sa neutralité carbone et son rôle dans la transition énergétique.

Le 5 juin 2025, le tribunal judiciaire de Paris examinera une affaire inédite en France : la sincérité de la « stratégie climat » de TotalEnergies. Trois ONG Greenpeace France, Les Amis de la Terre France et Notre Affaire à Tous, soutenues par ClientEarth, ont déposé, en mars 2022, un recours pour « pratiques commerciales trompeuses ». Elles reprochent au géant pétrolier une campagne de communication trompeuse, lancée en 2021 lors de son changement de nom de Total en TotalEnergies, vantant un objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050.

À grand renfort de publicités sur les réseaux sociaux, dans la presse et sur son site, TotalEnergies s’est présenté comme un « acteur majeur de la transition énergétique ». Des annonces montrent des éoliennes sur fond de paysages verdoyants, promettant un « net zéro » en 2050. Pourtant, selon Sarah Fayolle, de Greenpeace France, « les énergies fossiles dominent encore l’activité et les investissements du groupe, en contradiction avec cet objectif ». Les ONG dénoncent un cas flagrant de greenwashing, violant le code de la consommation qui interdit les pratiques commerciales déloyales.

Le gaz fossile en ligne de mire

Un point central du recours concerne la promotion du gaz fossile comme « énergie de transition » moins polluante. « C’est faux », affirme Apolline Cagnat, juriste chez Greenpeace. « Le gaz, comme le pétrole, contribue aux émissions de gaz à effet de serre, notamment via des fuites de méthane sous-évaluées ».

Parallèlement, TotalEnergies a lancé de nouveaux projets pétroliers et gaziers, notamment en Ouganda, renforçant, selon les ONG, une dépendance aux énergies fossiles.

Juliette Renaud, coordinatrice des Amis de la Terre s’est félicitée de l’alerte du rapporteur spéciale de l’ONU Michel Forst face à ce qu’elle nomme les « attaques répétées aux défenseurs de l'environnement mobilisés contre les projets […] en Ouganda ».

TotalEnergies se défend en affirmant que ses communications sont « fiables et fondées sur des données vérifiables ». La major pétrolière revendique une baisse de 36 % de ses émissions de gaz à effet de serre depuis 2015 et de 55 % de celles de méthane depuis 2020. Elle argue que sa communication institutionnelle, distincte de la publicité commerciale, ne relève pas du code de la consommation.

Ce procès, une première pour le secteur des hydrocarbures en France, pourrait créer un précédent en droit de la consommation, en France et en Europe. Les ONG espèrent qu’il freinera les stratégies d’écoblanchiment, accusées de retarder la transition écologique. Comme l’a déclaré Antonio Guterres à la COP27 en 2022, ces « fausses promesses de net zéro » sont une « dissimulation toxique » qui menace l’action climatique.