Nommé à la tête du gouvernement il y a un peu plus de trois mois, François Bayrou devait, selon ses propres mots, gravir un «Himalaya» de défis. Le 27 mars, 104 jours après son arrivée à Matignon, c’est un sommet d’impopularité qu’il affronte. Selon la dernière enquête Odoxa-Backbone Consulting réalisée pour Le Figaro, 74% des Français jugent ses débuts insatisfaisants, un chiffre en hausse de 18 points depuis janvier. Plus alarmant encore, 81% expriment leur mécontentement face à son action dans des domaines clés comme le pouvoir d’achat, l’éducation ou la santé. Ce rejet, quasi unanime, traverse les lignes politiques, des Républicains (64%) aux Insoumis (86%), ne laissant au Premier ministre qu’un soutien fragile au sein de Renaissance, le parti présidentiel.
«Jamais un chef de gouvernement n’aura été aussi fragilisé aussi vite»
Alors qu’une enquête d’opinion avait révélé une popularité en chute pour ses 100 jours de mandat, un tel désaveu, aussi rapide, est historique. «Jamais un chef de gouvernement n’aura été aussi fragilisé aussi vite», souligne Céline Bracq, directrice générale d’Odoxa. Les critiques fusent, notamment sur l’absence de réformes marquantes. L’adoption des budgets via l’article 49.3, perçue comme un aveu d’impuissance face à une Assemblée sans majorité absolue, a cristallisé les frustrations. Les Français reprochent à François Bayrou un immobilisme patent, notamment sur le pouvoir d’achat (83 % d’insatisfaction), alors que ses promesses de relance, sur l’éducation ou la lutte contre la bureaucratie, peinent à convaincre. Sa visite prévue le 28 mars à Rueil-Malmaison, aux côtés d’Élisabeth Borne, pour évoquer la «reconquête de l’écrit», risque de passer pour un pansement sur une plaie béante.
La personnalité de François Bayrou, jadis perçue comme un atout, n’échappe pas au jugement sévère. Les qualités qu’on lui prêtait – convictions, sympathie, courage – s’effritent dans l’opinion. Des déclarations controversées, comme celle sur l’impossibilité de revenir à la retraite à 62 ans, ont ravivé les tensions avec les syndicats et alimenté la menace d’une censure. Portée par le Rassemblement national (RN) et un Parti socialiste (PS) jusque-là conciliant, cette hypothèse séduit 57% des Français, un score en hausse par rapport à son prédécesseur Michel Barnier.
Au sein de sa majorité, les fissures s’élargissent. Les accusations d’inaction, amplifiées par l’affaire de l’école Bétharram, fragilisent sa position. Lors d’une récente réunion à Matignon avec Gabriel Attal et Édouard Philippe, figures influentes de la coalition, Bayrou a tenté de ressouder son camp, mais les dissensions persistent.
François Bayrou, qui voulait incarner un renouveau, se heurte à une défiance massive dans un contexte parlementaire très compliqué mais les Français ne croient pas encore qu’il s’agit de la fin de son histoire à Matignon puisque 69 % d’entre eux doutent encore de son départ imminent.