France

Augmentation des dépenses de défense, le casse-tête de Bercy

Le ministre de l’Économie, Éric Lombard, avance des pistes pour augmenter les dépenses militaires françaises. Il réclame ainsi «plus d’efforts» budgétaires, tout en écartant une hausse de la dette et en misant sur l’emploi et les hauts revenus.

Le ministre français de l’Économie, Éric Lombard, a jeté un pavé dans la mare mardi 4 mars 2025 sur France info. Alors que les États-Unis se retirent du soutien à l’Ukraine, il appelle à un sursaut budgétaire pour renforcer les dépenses militaires françaises et européennes. «Nous devrons faire plus d’efforts pour nous protéger, pour bâtir cette économie en faveur de la paix et renforcer la défense dans un modèle européen», a-t-il déclaré, avant d’ajouter: «Nous allons devoir dépenser plus d’argent public et donc effectivement, cela imposera plus d’efforts».

Les ambitions affichées par Éric Lombard interviennent dans un contexte géopolitique tendu. Le ministre de l’Économie s'est montré particulièrement hostile à la Russie et a gonflé les muscles en déclarant: «L'Europe a 10 fois plus de richesse annuelle que la Russie. L’Europe a 2 fois le budget de la défense de la Russie». 

Actuellement, le budget militaire français s’élève à environ 60 milliards d’euros par an, soit 2 % du PIB, avec une augmentation prévue de 3 milliards annuels jusqu’en 2030 via la loi de programmation militaire. Mais pour Éric Lombard, «il faudra aller plus vite et plus fort». Problème: la France est «sous contrainte budgétaire», avec une dette élevée et plus de 50 milliards d’euros versés chaque année aux créanciers. «Nous devons limiter l’augmentation de notre dette», martèle-t-il, excluant de financer ces dépenses par un endettement supplémentaire.

Alors, où trouver les fonds ? Le ministre écarte d’emblée toute coupe dans les budgets sociaux, éducatifs, sanitaires ou judiciaires: «On va maintenir le système de protection sociale français», promet-il. Deux pistes principales émergent. D’abord, l’emploi: «Le premier levier pour équilibrer nos dépenses publiques, c’est le taux d’emploi», insiste-t-il, visant notamment les 50-55 ans et la réduction du chômage. Une solution théoriquement vertueuse, mais qui risque de se heurter à une conjoncture économique incertaine.

Ensuite, les hauts revenus. Éric Lombard envisage de pérenniser la contribution différentielle votée en 2025, visant les ménages aisés. «Les personnes qui ont une épargne importante doivent contribuer, et c’est ce à quoi nous réfléchissons», explique-t-il. Cette mesure pourrait rapporter environ 2 milliards d’euros par an, un montant modeste face aux besoins, mais symbolique. En revanche, pas question de toucher aux avoirs russes gelés: «Ça ne peut pas être des avoirs qui seraient capturés», tranche-t-il, invoquant les accords internationaux.

Enfin, le secteur privé sera sollicité. Une réunion est prévue le 20 mars à Bercy avec des investisseurs, banquiers et assureurs pour lever des fonds, tandis que des produits d’épargne citoyens sont à l’étude. Entre ambition militaire et rigueur budgétaire, Éric Lombard marche sur un fil, cherchant à muscler la défense sans déséquilibrer les comptes publics. Un défi de taille dans un pays déjà sous pression financière.