Les déclarations du président français à Rabat le 29 octobre en faveur de la «souveraineté marocaine» sur le Sahara occidental n’ont pas tardé à provoquer une vague de critiques en Algérie. Cette ex-colonie espagnole, disputée depuis des décennies entre Rabat et les indépendantistes du Front Polisario, est un sujet sensible pour Alger, qui soutient fermement le droit des Sahraouis à l’autodétermination. Mais en réaffirmant que « le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine », Emmanuel Macron a fait peu de cas des positions algériennes.
La presse algérienne n’a pas mâché ses mots face à cette déclaration. Sous le titre «Macron bafoue le droit international», le quotidien El Watan déplore une décision qui risque de «sectionner définitivement le fil d’Ariane qui reliait encore Paris à Alger». La position de la France, énoncée dès l'été 2024 dans une lettre de l'Elysée au roi du Maroc, avait déjà suscité la colère d’Alger, conduisant au rappel immédiat de son ambassadeur en signe de protestation.
En dénonçant ce rapprochement comme une tentative de «consolider le fait accompli colonial dans le Sahara occidental», El Watan cite les représentants sahraouis, qui appellent à l’application de l’accord de cessez-le-feu de 1991 et du référendum d’autodétermination, resté jusqu’ici lettre morte.
Pour le site d'information TSA, cette visite au Maroc et le soutien à Rabat seraient un «marché de dupes» pour Macron, car si le Maroc bénéficie de cette prise de position symbolique, les contreparties pour la France restent négligeables. «Macron repartira les valises vides», ironise le média, soulignant que cette alliance avec Rabat «s’est faite sur le dos du peuple sahraoui».
«Macron s’entête au risque de détruire les derniers liens diplomatiques avec Alger»
Selon Echorouk, un quotidien arabophone, cette prise de position vient aussi entériner l’échec des tentatives de rapprochement de Macron avec Alger, entreprises depuis 2020. Alors que la France perd ses derniers avantages économiques dans la région, la politique de l'Élysée semble «compromettre davantage les relations entre les deux pays». Echorouk souligne également que les accords économiques et les partenariats clés entre les deux nations sont de plus en plus remis en cause.
Certaines voix françaises expriment aussi leurs inquiétudes quant aux effets de ce soutien à Rabat. Patrick Stefanini, ancien haut fonctionnaire et proche de Nicolas Sarkozy, a mis en garde sur BFMTV : «Ce que j’espère, c’est que cette visite ne se traduira pas par une dégradation forte de nos relations avec l’Algérie. Parce que si on perd avec l’Algérie ce qu’on gagne avec le Maroc, on sera passé à côté du sujet.»
La presse algérienne voit également dans le soutien de Macron à la position marocaine un geste en contradiction avec le droit international, alors que la Cour de justice de l’Union européenne a annulé les accords commerciaux entre l’Union et le Maroc sur des produits issus du Sahara occidental. Pour Alger, cette alliance risque de déséquilibrer encore davantage la région du Maghreb et de compromettre toute perspective de coopération future avec la France.