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Quand Al-Qaïda traque les Touaregs qui «espionnent pour la France»

Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) déclare avoir tué deux individus soupçonnés d’être des informateurs pour le compte des Français. Tous deux étaient Touaregs.

Tout serait parti du Mali. L’agence de presse privée Al-Akhbar a diffusé un communiqué d’Aqmi. Dans ce dernier, le groupe terroriste affirme avoir assassiné deux Touaregs originaires du nord Mali en octobre dernier. Leur faute ? Ils auraient été des espions travaillant pour la France.

Evincés du jihad

Mohamed Ag Abdellah et Fajr Ag Sidi Mohamed, les deux victimes, étaient originaires de la région septentrionale du Mali abritant une forte communauté touareg.

A l’origine peuple nomade du Sahara parlant une langue berbère, les Touaregs ont entamé une sédentarisation depuis les années 1950. Ils sont surtout présents en Algérie, Libye, Niger, Burkina Faso et au Mali. Dans ce dernier pays, ils se sont révoltés à plusieurs reprises depuis le début des années 2000. En 2012, Iyad Ag Ghali, un leader Touareg, fonde le mouvement terroriste Ansar Dine. Très vite, le groupe revendique l’établissement de la «charia» dans l’ensemble du territoire et s’allie à Aqmi. Avec les derniers cités ainsi que le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (MUJAO), ils prennent le contrôle du nord du Mali. Ce qui déclenchera l’intervention française et son opération Serval.

Il apparaît ensuite que des divisions ont éclaté entre groupes jihadistes et combattants touaregs. Les premiers ayant évincé les seconds.

C’est dans ce contexte que prennent place les assassinats revendiqués par Aqmi. Selon le communiqué, Mohamed Ag Abdellah a été tué le 9 octobre 2015 à Bir au Mali. Fajr Ag Sidi Mohamed a été assassiné dix jours plus tard dans sa cachette de Burje Al-Barajina, en Algérie. La filiale d’Al Qaïda accusent les deux hommes d’avoir «collecté des renseignements sur ses positions pour les fournir ensuite aux Français». Les victimes auraient même «tué» certains des combattants terroristes.

Aqmi appelle à «traquer les collaborateurs avec les Français ou avec d'autres apostats».

Bis repetita

Ce n’est pas la première fois que les islamistes d’Aqmi s’en prennent aux Touaregs. En septembre 2014, cinq d’entre eux, appartenant à la même famille, avaient été enlevés à proximité de Tombouctou dans le nord-ouest du Mali. Quelques jours plus tard, quatre avaient été libérés. Le cinquième avait été décapité. Selon un proche, il était, lui aussi, accusé d’être «un informateur» de l’armée française.

Reste que ces revendications de la part d’Aqmi restent à prendre avec des pincettes. Al-Akhbar est un média connu pour relayer régulièrement les communiquées d’Aqmi ainsi que d’autres groupes jihadistes dans jamais les démentir.

Du côté du terrain, l’opération Serval et sa suite, Barkhane, qui inclut de nombreuses forces régionales, ont mis en déroute nombre de terroristes dans la région. Reste que des zones entières échappent encore au contrôle des différentes forces armées, maliennes et étrangères.