France

«C'est toi le cochon» : vive altercation à l'Assemblée nationale, sur fond de conflit au Proche-Orient

L’Assemblée nationale a connu une journée agitée le 28 mai alors qu’un député de La France insoumise a brandi un drapeau palestinien dans l’hémicycle, lui valant d'être sanctionné. Lors de l'interruption de séance qui s'en est suivi, deux élus se sont écharpés devant les caméras, se traitant de «porc» et de «pourriture».

«C'est toi le cochon, t'es dans la boue du génocide palestinien !»

Le 28 mai, dans les couloirs du Palais Bourbon, les journalistes ont été témoin d'un échange particulièrement tendu entre deux députés. Alors que David Guiraud et Alma Dufour, élus de La France insoumise (LFI), intervenaient devant les journalistes, leur homologue apparenté Les Républicains (LR) Meyer Habib est venu interrompre l'interview.

«Comment vous leur donnez la parole ?», lance Meyer Habib à l'attention des journalistes. «Qu'est-ce que tu fais-là, barre-toi !», l'apostrophe l'élu insoumis. «À qui tu parles, on n'a pas élevé les cochons ensemble !», rétorque Meyer Habib. «C'est toi le cochon, t'es dans la boue du génocide palestinien», enchaîne David Guiraud. «C'est un scandale, vous faites honte à l'Assemblée nationale !», poursuit Meyer Habib, écarté par des huissiers, Alma Dufour lui assurant qu'il sera «poursuivi en justice».

«Regardez-le, ce monsieur est un porc ! Il défend un génocide depuis le début, c'est un porc ! [...] Il fait honte à la France ! Il fait honte au pays et on devrait tous avoir honte d'être représenté par des gens comme ça, qu'ont un cœur à sens unique !», déclare alors le député insoumis, qui perd patience. «Espèce de pourriture», lui répond le député apparenté LR.

Un affrontement qui pourrait se poursuivre devant les tribunaux

L’incident entre les deux députés s'est poursuivi par médias interposés. Ainsi, le député Meyer Habib a-t-il annoncé sur BFMTV en fin d’après-midi qu’il porterait plainte contre le député David Guiraud, qualifiant ce dernier de «crapule antisémite». Sur CNews, il a accusé son homologue d'être «négationniste». «On a aujourd'hui des députés du Hamas au sein de l'Assemblée nationale», a-t-il ajouté. Propos qu'il réitérera plus tard sur la plateforme X (ex-Twitter), dénonçant le «spectacle de déchéance et de honte que les Insoumis ont imposé au temple de la République».

«Qu’il porte plainte ça n’a pas d’importance», a rétorqué David Guiraud, également invité du plateau de BFMTV. Le député insoumis a pour sa part ironisé, présentant ses excuses à «tous les cochons de France», affirmant n'en avoir «jamais vu un défendre un génocide». Plusieurs élus LFI sont venus prêter main forte au député Guiraud, à l’image du coordinateur national du parti, Manuel Bompard, rappelant que Meyer Habib avait qualifié en octobre 2023 la population palestinienne de «cancer» et affirmant qu’il était une «honte pour l’Assemblée nationale».

Sanction de l'Assemblée nationale : «C’est une médaille», estime Delogu

L’accrochage entre les deux députés trouve son origine dans un incident de séance, qui a eu cours juste avant l'altercation, lorsque le député LFI Sébastien Delogu a brandi un drapeau palestinien dans l’hémicycle, ce qui est contraire au règlement de l’Assemblée. Ce dernier a été sanctionné, suite à un vote de ses pairs, d’un retrait de la moitié de son indemnité parlementaire pendant deux mois et d’une exclusion temporaire durant 15 jours. 

«C’est une médaille parce qu’il y a des massacres actuellement en Palestine», a-t-il déclaré au micro de La Chaîne parlementaire (LCP) après l'annonce de la sanction. «La France est malheureusement complice de ce qu’il s’y passe puisqu’elle vend des armes», a poursuivi le député des Bouches-du-Rhône. Quelques minutes plus tôt, celui-ci avait affirmé à la sortie de l’hémicycle que son geste visait à alerter le président de la République pour que la France cesse de livrer des armes à Tel-Aviv.

Macron prêt à reconnaitre la Palestine, «à un moment utile»

Le même jour, depuis le château Meseberg, au nord de Berlin, le président français Emmanuel Macron a de son côté déclaré être «prêt à reconnaître un État palestinien». «Cette reconnaissance doit arriver à un moment utile», a-t-il toutefois précisé. Mise au point qui survient quelques jours après que trois États membres de l’Union européenne aient franchi ce pas.

Depuis l'éclatement du conflit entre le Hamas et l'État hébreu, suite à la sanglante attaque du Hamas début octobre 2023, ce conflit au Proche-Orient s'est invité en France où des manifestations propalestiniennes ont régulièrement lieu afin, notamment, de réclamer un cessez-le-feu à la Gaza. Traditionnellement, Paris, tout comme Moscou, prône une solution à deux États afin de mettre un terme à plusieurs décennies de conflits israélo-palestiniens. Depuis l'éclatement du conflit entre le Hamas et l'État hébreu, la France a appelé à maintes reprises à un cessez-le-feu et à la libération des otages.

Néanmoins, la position du chef de l'État lui-même sur ce conflit ne ferait pas consensus au sein du Quai d'Orsay. Dans une note interne, ébruitée mi-novembre par Le Figaro, plusieurs ambassadeurs en poste au Moyen-Orient ont regretté le positionnement d'Emmanuel Macron sur cette crise. Note qui, selon une source diplomatique du quotidien français, évoquerait «une perte de crédibilité et d’influence de la France» ainsi que la détérioration de son image «dans le monde arabe», notamment lorsque le président français avait soumis l'idée, lors d'un déplacement fin octobre en Israël, d'élargir l'objectif de la coalition internationale contre Daech (État islamique) en incluant la lutte contre le Hamas.