Le bilan est lourd après huit jours de violences en Nouvelle-Calédonie : 400 entreprises et commerces ont subi des dégradations en Nouvelle-Calédonie, a indiqué ce 21 mai le procureur de la République à Nouméa, Yves Dupas. Il a évoqué par ailleurs «d’'importantes dégradations, notamment par incendie […] concernant d'une part des bâtiments ou équipements publics et d'autre part des structures économiques», alors que le calme n’est pas revenu dans l’archipel après huit jours d’émeutes dues à la contestation par les indépendantistes calédoniens d’une modification de la loi électorale votée à Paris.
«Les chiffres sont colossaux, la magnitude de l'impact sera énorme. L'économie calédonienne est structurellement atteinte», estimait déjà le 17 mai la CCI France, qui fédère les chambres de commerce et d’industrie du pays. La chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie a appelé «préserver le peu qu'il reste» de l'économie de l'archipel.
Sur France Culture ce 21 mai, le président de la chambre de commerce et d’industrie de Nouvelle-Calédonie David Guyenne a évoqué un bilan à la hausse en matière de dégradation pour les entreprises. «Aujourd'hui, on vise plutôt le milliard d'euros. Tous les secteurs d’activité sont touchés», a-t-il affirmé, avant de préciser : «Le commerce en majorité, bien sûr, mais aussi des industries et surtout beaucoup d’entreprises de services, notamment les concessionnaires automobiles.» Il a évoqué «200 entreprises brûlées et anéanties», correspondant à plus de 2 000 emplois.
«Plus d'une centaine d'entreprises sont totalement détruites», a pour sa part affirmé la présidente du Medef local Mimsy Daly. «Cela représente entre 1 500 et 2 000 emplois», a-t-elle ajouté. Le journal Les Échos prévoyait le 16 mai des pertes représentant «plus de deux points du PIB annuel de la Nouvelle-Calédonie».
Les émeutes surviennent dans un climat économique déjà peu propice dans l’archipel. Ainsi, Mimsy Daly évoquait dans le média local Kaori Media que la Nouvelle-Calédonie en était à sept années de récession et que l’archipel avait perdu près de 20 000 habitants au cours des cinq années passées dans un contexte de retournement du marché du nickel.
Une situation sécuritaire toujours incertaine
Ce 21 mai, la Nouvelle-Calédonie est toujours sous le régime de l'état d'urgence et du couvre-feu. Le Haut-commissariat en Nouvelle-Calédonie dénombrait 76 barrages neutralisés et 21 grandes surfaces en cours de réapprovisionnement ainsi que 22 interpellations et des opérations de sécurité en cours ce 21 mai à midi, heure métropolitaine.
Le Haut-commissariat évoque également un «retour au calme [qui] se poursuit sur l’ensemble du territoire», faisant valoir des renforts de policiers et de gendarmes ainsi que le déploiement de moyens militaires «afin d’assurer la protection des bâtiments publics».
Des images prises sur place témoignent néanmoins de la tension qui perdure sur l’archipel où des jets de pierres ont toujours cours sur les forces de police et de gendarmerie qui évacuent les barrages et mènent des opérations de sécurité.
Le communiqué du Haut-commissariat affirme par ailleurs que «toutes les dispositions sont prises pour permettre aux touristes encore présents sur l’archipel de pouvoir rentrer chez eux».
La fermeture de l’aéroport de Nouméa est lui confirmé jusqu’au 14 mai à 9h, comme l’a indiqué le directeur de la CCI de Nouvelle-Calédonie Charles Roger à l’AFP. Le président Emmanuel Macron a de son côté annoncé qu'il se rendrait sur place dans la soirée du 21 mai.
Les émeutes qui agitent la Nouvelle-Calédonie ont éclaté après l’annonce le 13 mai du vote par l’Assemblée nationale d’une loi visant à élargir le droit de vote à de nouveaux électeurs aux élections provinciales, le scrutin local le plus important dans cet archipel.
Jusque-là, seules les personnes inscrites sur les listes électorales lors des accords de Nouméa de 1998 et leurs descendants pouvaient voter. Les personnes arrivées de métropole après 1998 et une partie des natifs étaient donc exclus du corps électoral. Les indépendantistes estiment que les Kanaks (population native) risquent d’être désavantagés par cette réforme. Cette arrivée de nouveaux électeurs est appelée le «dégel du corps électoral».