«Le chantage a payé !» Le président du groupe Les Républicains au Sénat Bruno Retailleau n’a pas caché son agacement ce 24 avril quant à l’accord signé entre les quatre syndicats représentatifs de la SNCF et la direction de l’entreprise. Pour lui, «l’accord de la SNCF avec les cheminots sur les retraites est une capitulation».
Le 22 avril, ceux-ci se sont mis d’accord autour d’un texte sur les fins de carrière, qui annule une partie des éléments de la réforme des retraites de 2023. Au vote favorable des centrales modérées Unsa-Ferroviaire et CFDT-Cheminots, s’est ajouté celui de SUD-Rail et de la CGT-Cheminots, réputés plus durs.
Des syndicats satisfaits
Pour les cheminots, le régime de cessation anticipée d’activité est ainsi allongé et voit sa rémunération relevée à partir de 2025. Ce régime passe de 18 à 30 mois pour les agents ayant un métier où la pénibilité est reconnue et de 12 à 18 mois pour les autres agents, également avec la moitié non travaillée. La dispense de travail est ainsi allongée de trois à six mois.
Dans des propos rapportés par l’AFP, le secrétaire fédéral de SUD-Rail Erik Meyer s’est félicité d’un accord qui a pour effet «de compenser en partie les effets néfastes de la réforme des retraites». Cité par le journal L’Humanité, un responsable de la CGT-Cheminots se félicite : «Les initiatives locales ou nationales à l’appel de la CGT ont permis de gagner l’amélioration des dispositifs de fin de carrière existants pour les cheminots statutaires et contractuels.» La capacité des cheminots à mener des actions coups de poing comme en mai 2023 avec l’invasion des bureaux de la Commission européenne semble avoir payé.
Le secrétaire général adjoint de la CFDT Sébastien Mariani estime de son côté que cet accord «permet de répondre au problème d’attractivité de certains métiers».
«Un accord lamentable» : la droite ne décolère pas
À droite, la colère du président du groupe LR au Sénat Bruno Retailleau, qui voit dans ce compromis «un accord lamentable», est partagée par le rapporteur du budget au Sénat Jean-François Husson. Ce dernier s’indigne, dans des propos rapportés par Le Figaro, d’un gouvernement qui «cède sur tout», ainsi que d'une «remise en cause» des «efforts de la dernière réforme des retraites».
L’annonce de l’accord entre les syndicats et la direction de la SNCF a également été très commentée par le monde médiatique. Ainsi, le directeur délégué de la rédaction du Figaro Vincent Trémolet de Villers s’en est pris au gouvernement en affirmant sur les ondes d’Europe 1 : «Les ministres disent surveiller les dépenses à l’euro près mais la SNCF lâche des dizaines de millions d’euros pour acheter la paix sociale. Ce n’est pas "tu casses, tu répares", mais plutôt "tu menaces et l’État casque" : le privé finance et le public dépense.» Dans une chronique du Figaro, sa collège Bertille Bayart évoque pour sa part «les Jeux olympiques, quoiqu’il en coûte à la SNCF», estimant que la direction de l’entreprise a probablement écarté la menace d’un mouvement social pendant les JO.
Enfin, le directeur de l'Institut de recherches économiques et fiscales (IREF) Nicolas Lecaussin interpelle de son côté sur la part de la subvention de l’État à la SNCF qu’il évalue à 20 milliards d’euros et qu’il compare au budget du ministère de la Justice qui s’élève à 10 milliards d’euros.
Du côté de la direction de la SNCF, le PDG Jean-Pierre Farandou n’a pas communiqué sur le sujet. En février, il avait pourtant déclaré : «Je ne veux plus qu’on utilise la grève comme point d’entrée du dialogue social.»