Si le président de la République a fait part de son intention d'«apaiser» la situation en France, où les manifestations, grèves et blocages contre la réforme des retraites restent nombreuses, sa sortie du 21 mars sur «la foule» qui n'a selon lui «pas de légitimité face au peuple qui s'exprime souverain à travers ses élus» l'a manifestement desservi. Le lendemain, il a remis le couvert lors d'une interview sur France 2 et TF1, précisant qu'il évoquait dans ses propos les violences, et ajoutant même : «On ne peut accepter ni les factieux ni les factions»
Nous ne sommes pas une horde de sauvages
Les oppositions ne se sont pas privées d'étriller cette énième déclaration polémique d'Emmanuel Macron. «Ce n'est pas la foule qui s'oppose à Emmanuel Macron, c'est le pays tout entier presque», a ainsi réagi le député insoumis François Ruffin sur LCI. Ce dernier a rappelé que les «syndicats unis» et que «deux Français sur trois» s'opposent à la réforme des retraites depuis des mois, soit une nette majorité.
«Quand il utilise le terme "foule", on a l'impression d'une horde de sauvages. Nous ne sommes pas une horde de sauvages», s'est insurgée l'écologiste Sandrine Rousseau sur BFM TV, reprochant au président de la République une formule blessante selon elle pour les nombreux manifestants et son incapacité à «se remettre en question». D'après l'élue EELV, le chef de l'Etat rechercherait même «le pourrissement» du mouvement, à l'instar de la stratégie qu'il aurait adoptée pendant le mouvement des Gilets jaunes.
«Quel est leur but ? Énerver encore davantage les Français ?», s'est interrogé le dirigeant des Patriotes Florian Philippot, mettant également en cause Elisabeth Borne, celle-ci ayant estimé qu'il était possible d'employer le terme «victoire» à propos de l'adoption à neuf voix près du texte gouvernemental. Le souverainiste n'a pas hésité à qualifier le président de «Macroncescu», le comparant à l'ancien dictateur roumain.
Macron doit «changer de vocabulaire», selon Marleix
Mais le chef de l'Etat s'est également attiré des critiques à droite et au centre, dont celles du chef des députés Les Républicains Olivier Marleix, interviewé sur France Inter. «C'est un vocabulaire qui m'inquiète un peu de la part du président de la République. On est dans un moment de tension évident, où lui-même n'a pas beaucoup de portes de sortie», a-t-il réagi. «Je pense que le rôle du président de la République c'est de chercher à apaiser dans ces moments-là, pas de donner le sentiment de jeter de l'huile sur le feu», a poursuivi l'élu, jugeant «urgent» pour le président de «rectifier le tir» et de «débuter le dialogue social».
L'un des plus proches alliés d'Emmanuel Macron, le président du ModDem François Bayrou, a aussi exprimé des réserves. «Les mots dans ces périodes sont facilement excessifs, moi je n'aurais pas dit les choses comme ça», a-t-il déclaré sur France Info. Pour le Haut-commissaire au Plan, «les manifestations ont leur légitimité mais ça n'est pas une légitimité supérieure à la légitimité démocratique». Il a argué, à l'instar de l'ancien Premier ministre Manuel Valls invité sur France 2, que l'expression du président se référait à l'écrivain Victor Hugo, qui avait établi «la distinction entre la foule et le peuple».