Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui a récupéré cet été le portefeuille des Outre-mer, entame ce 21 août un déplacement de trois jours à Mayotte avec comme priorité la lutte contre l'immigration clandestine sur l'île, qui fera l'objet d'un débat au Parlement à l'automne prochain avant la présentation d'un projet de loi.
L'objectif est de durcir les conditions d'accès à la nationalité française pour les enfants nés dans le département. Le ministre espère en effet pouvoir inscrire dans ce texte l'obligation pour «l'un des deux parents [d'être] régulièrement depuis plus d’un an [contre trois mois actuellement] sur le territoire [de Mayotte] afin que leur enfant soit reconnu comme Français», a-t-il déclaré dans un entretien au Journal du dimanche. Cette mesure devait déjà figurer dans le projet de loi spécifique à Mayotte avorté début 2022 après son rejet par les élus locaux.
La moitié de la population de Mayotte ne possède pas la nationalité française selon l'Insee
Selon l'Insee, près de la moitié de la population de Mayotte ne possède pas la nationalité française, mais un tiers des étrangers sont nés sur l'île. Pour lutter contre «les reconnaissances frauduleuses de paternité» pratiquées, dit-il, par des hommes en situation régulière au bénéfice «d'enfants d'immigrés fraîchement arrivés», Gérald Darmanin annonce que «ces pères [devront] prouver qu’ils entretiennent l’enfant pendant trois ans et non plus seulement deux».
Située dans l'océan Indien entre l'Afrique de l'Est et Madagascar, cette île, peuplée de 350 000 à 400 000 personnes selon les autorités, a vu sa population quadrupler entre 1985 et 2017, selon l’Insee, sous l'effet conjugué d'une forte natalité (plus de quatre enfants par femme) et de l'importante émigration d'habitants venus de l'archipel voisin des Comores.
Le gouvernement met en avant ses chiffres de reconduites à la frontière, plus de 23 000 en 2021, soit une hausse de 78% par rapport à 2020, année marquée par le Covid, et l'augmentation des interceptions de «kwassas-kwassas», ces embarcations légères à moteur utilisées par les migrants comoriens.
Un département frappé par l'insécurité, le chômage et la pauvreté
Mayotte, où l’âge moyen s’élevait à 23 ans en 2017, peine à insérer sa jeunesse dans la vie active : l'an dernier, 25 000 jeunes de 15 à 29 ans n'étaient ni en emploi, ni en études, ni en formation, selon l'Insee, soit 36% de cette tranche d'âge, une part trois fois plus élevée que sur le reste du territoire français (13%).
L'île, théâtre régulier d'affrontements entre bandes ou avec les forces de l'ordre, connaît aussi une délinquance élevée, bien plus importante qu'en France métropolitaine, avec quatre fois plus de dépôts de plainte pour cambriolages et des agressions physiques beaucoup plus fréquentes.
Une insécurité alimentée par une grande pauvreté : 194 000 Mahorais, soit 74% de la population, vivent avec un niveau de vie inférieur à 50% de la médiane nationale, toujours selon l'Insee.