A quelques jours du lancement de son propre parti politique, prévu le 9 octobre au Havre, Edouard Philippe, actuel maire de la ville, insiste, dans une interview accordée à l'hebdomadaire Challenges, sur le poids de la dette publique, qu’il considère comme «une question fondamentale de souveraineté nationale».
«Nous préférons continuer à danser au-dessus du volcan que prendre les mesures, drastiques – et parfois amères –, qui s'imposent», conte l’ex-chef d’un des gouvernements qui a le plus dégradé la situation des finances publiques en France depuis la mandature de Sarkozy, estimant en outre que «la première réforme à faire est celle des retraites».
Edouard Philippe avait amorcé cette réforme lorsqu’il était Premier ministre d’Emmanuel Macron (de mai 2017 à juillet 2020), recourant même à la procédure controversée de l'article 49-3, avant de faire machine arrière lors du déclenchement de la crise du Covid-19.
Dans cette interview, l’ancien Premier ministre déclare : «A près de 330 milliards [d'euros], les pensions constituent de loin le premier poste budgétaire – plus d'un quart de la dépense publique – et le premier foyer d'économies possibles.»
«La seule solution raisonnable», affirme Edouard Philippe
Pour Edouard Philippe : «La seule solution raisonnable est donc d'allonger la durée de vie active en repoussant l'âge de départ à la retraite à 65, 66 ou 67 ans.» Parmi les autres pistes d'économies selon lui, la réduction du nombre de fonctionnaires dans les collectivités locales.
La dette c’est pour les retraités ; et pour tous ceux qui ne trouvent pas de boulot après 50 ans, ce sera l’assurance chômage au rabais puis la misère en attendant 67 ans
Interrogé sur France Inter sur la retraite à 67 ans, le patron des députés LREM Christophe Castaner a estimé qu'un tel report n'était pas «nécessaire au moment où on se parle [avec] les informations que nous avons ». Pour la députée et présidente déléguée de LREM Aurore Bergé, invitée de Sud Radio, «tout ce qu'on a dit sur la nécessité de transformer [le] système de retraite reste complètement d'actualité».
Opposition à gauche
L'opposition de gauche a pour sa part fustigé les propos de l’ancien Premier ministre, qui n'ont selon le premier secrétaire du PS Olivier Faure, cité par l’AFP, «qu’un seul mérite, celui de la clarté». Et d’ajouter : « La dette c’est pour les retraités ; et pour tous ceux qui ne trouvent pas de boulot après 50 ans, ce sera l’assurance chômage au rabais puis la misère en attendant 67 ans.»
«Pourquoi s'arrêter à 67 ans ? 70, 80, 90 ans ? L'idéal serait que les gens crèvent au travail, non ? Beau projet de société», a de son côté twitté Ian Brossat, adjoint à la mairie de Paris et directeur de campagne du candidat communiste à la présidentielle Fabien Roussel. Laurent Berger, 1er secrétaire de la CFDT, reçu sur France Info, a aussi réagi à la proposition d’Edouard Philippe en déclarant : «Je crois que ce serait une bombe de faire un truc pareil.» Et de préciser : «Je ne crois pas qu'il faille faire payer l'ensemble de la question de la dette dans notre pays par la question des retraites.»
A la fin du deuxième trimestre 2017, lorsqu’Edouard Philippe a pris ses fonctions, la France devait 2 231,7 milliards d’euros à ses créanciers. Elle en devait plus de 400 de plus (2 638,3 milliards d’euros) à la fin du second trimestre 2020, juste avant que le désormais maire du Havre ne rende son tablier.