Les exportations d'armements français ont baissé de près de 41% en 2020, sous l'effet de la crise sanitaire mondiale et en l'absence de la conclusion de grands contrats emblématiques, selon un rapport annuel remis au Parlement le 1er juin, dont l'AFP s'est procuré une copie.
En 2020, le montant des prises de commande s'est élevé à 4,9 milliards d'euros, contre 8,3 milliards d'euros l'année précédente. L'Arabie saoudite (703,9 millions d’euros), les Etats-Unis (433,6 millions d’euros) et le Maroc (425,9 millions d’euros) figurent parmi les plus gros clients de la France en 2020.
«Ce résultat, en retrait par rapport aux précédentes années, s'explique en partie par les contraintes liées à la crise sanitaire mondiale qui ont repoussé à 2021 plusieurs prospects d’armement, en raison de la suspension des discussions commerciales et des décisions d'investissement associées, [ainsi que de] l'absence de grands contrats supérieurs à 500 millions d'euros pour l'année 2020», souligne le ministère français des Armées dans ce rapport.
Toutefois le ministère, qui peut se targuer de la signature cette année d'importants contrats de vente de Rafale à l'Egypte (30 exemplaires pour près de 4 milliards d'euros), à la Grèce (18 avions, dont 12 d'occasion) et à la Croatie (12 appareils d'occasion), assure que cette baisse ne traduit pas une tendance de fond.
Les exportations d'armements français avaient déjà baissé de près de 8,6% en 2019, après des années 2015, 2016 et 2018 particulièrement fastes, grâce notamment à la vente de Rafale à l'Egypte, à l'Inde et au Qatar.
Sur le plan des prises de commandes, l’Europe représente, pour la deuxième année consécutive, la principale destination des exportations françaises avec 25% (15% pour les pays de l'Union européenne et 10% pour les autres pays européens), le Royaume-Uni et la Grèce figurant parmi les six premiers clients de Paris.
Juste derrière, la zone Proche et Moyen-Orient représente 24% des commandes, contre 22% pour la zone Asie-Océanie, soit une part légèrement supérieure à celle observée ces trois dernières années. L'Afrique comptabilise quant à elle 16 % du total des commandes.
Contrôle parlementaire plus poussé
La question du contrôle des exportations est devenue plus en plus pressante avec notamment l'intervention de l'Arabie saoudite et des Emirats arabes unis, deux clients de Paris, dans le conflit au Yémen, où certaines ONG les soupçonnent de crimes de guerre.
Selon un sondage Harris Interactive réalisé mi-mai pour Amnesty International, 78% des personnes interrogées jugent qu'il y a un manque de transparence sur les exportations d'armement. Deux députés, Jacques Maire (du parti présidentiel LREM) et Michèle Tabarot (Les Républicains), ont préconisé dans un rapport publié en novembre de renforcer les pouvoirs du Parlement sur le contrôle de ces exportations.
«Dans notre pays, l'exécutif est juge et partie de la qualité du processus d'examen des demandes de licences [d'exportation], notamment quant à l'examen rigoureux du respect du droit humanitaire international», déplorent les députés.
La décision d'exporter ou non est en effet prise en France par le Premier ministre sur avis d'une Commission interministérielle pour l'étude des exportations des matériels de guerre (CIEEMG), selon une procédure confidentielle.
La ministre des Armées Florence Parly affirme dans le rapport avoir commencé à intégrer les propositions des députés. Le rapport précise ainsi que Paris a refusé un total de 47 licences d'exportations en 2020, en grande majorité à destination de pays d'Asie, en réponse à la demande des deux députés.
Ces derniers réclamaient également que le contrôle du Parlement s'exerce sur les exportations de biens à double usage, civil et militaire, en s'intéressant à l'identité du bénéficiaire des livraisons.