Pfizer, Moderna, Novavax : les patrons de plusieurs laboratoires américains développant des vaccins contre le Covid-19 avec de l'argent public ont récemment empoché des millions de dollars grâce à la vente d'actions, suscitant des interrogations sur la convenance de telles transactions en temps de crise sanitaire.
Le jour même où le géant pharmaceutique Pfizer a annoncé que son vaccin était efficace à 90%, selon des données préliminaires, son directeur général Albert Bourla a ainsi vendu pour 5,6 millions de dollars de titres.
145 millions de dollars d'actions vendues entre le 15 mai et le 31 août, selon Accountable US
Rien d'illégal a priori : cette opération était prévue, estime Pfizer, selon des règles permettant aux dirigeants d'entreprises de procéder à l'achat ou à la vente de titres en fonction de critères prédéterminés, à une date ou à un prix précis afin d'éviter justement tout soupçon de délit d'initié.
En utilisant ces mêmes règles, plusieurs responsables de Moderna ont vendu pour plus d'une centaine de millions de dollars d'actions au cours de ces derniers mois.
La société n'a lancé aucun produit sur le marché depuis sa création en 2010, mais le gouvernement s'est engagé à lui verser jusqu'à 2,5 milliards de dollars si son vaccin était validé. Le titre Moderna est passé de 19 dollars en début d'année à 90 dollars actuellement.
Le patron de Novavax a pour sa part vendu 4,2 millions de dollars d'actions le 18 août, un peu plus d'un mois après l'annonce d'un financement public de 1,6 milliard de dollars.
L'organisation de défense des contribuables Accountable US a calculé qu'entre le début de l'opération américaine de coordination du développement des vaccins, le 15 mai, et le 31 août, les dirigeants de cinq compagnies pharmaceutiques avaient encaissé plus de 145 millions de dollars en vendant leurs actions.
François Asselineau voit dans le Covid-19 une «source d'arnaques»
Des flux financiers qui ont posé question jusqu'en France. «Le PDG de Pfizer annonce un vaccin sur la base de résultats partiels, dope le cours de ses actions et empoche 5 millions en vendant ses titres. Nous avons besoin d'un vaccin sûr, accessible, en lequel nous pouvons avoir confiance. C'est un enjeu public, pas un jeu économique !», a tancé sur Twitter la députée européenne insoumise Manon Aubry.
Le député La France insoumise (LFI) de Seine-Saint-Denis, Bastien Lachaud, a également réagi sur le même réseau social : «Big Pharma dans ses œuvres ! Annonce calculée pour gonfler le cours d'une action, délit d'initié du PDG de Pfizer, patrons rapaces et spéculateurs. Insupportable.»
De son côté, le président de l'Union populaire républicaine (UPR) François Asselineau a qualifié le Covid-19 d'«inépuisable source d'arnaques». «Les experts savent que l'annonce de la prétendue efficacité à 90% du vaccin Pfizer anti-Covid-19 était hasardeuse et prématurée. Son vrai but était de rapporter un "pognon de dingue" au PDG et aux actionnaires !», a-t-il dénoncé, toujours sur la plateforme de microblogging.
Enfin, l'éditorialiste et cofondateur du Monde Moderne, Alexis Poulin, a également remarqué sur Twitter que «le vaccin soigne d’abord le portefeuille des actionnaires».
Sollicité par l'AFP, le gendarme américain des marchés financiers n'a pas souhaité indiquer si des enquêtes avaient été ouvertes.