Economie

L’Insee observe une baisse du chômage «en trompe-l’œil»

Le chômage en France a diminué au deuxième trimestre, mais c'est une baisse en «trompe-l'œil» pour l'Insee, car liée au confinement qui a empêché des personne de chercher un emploi. La chute du nombre d'heures travaillées est, elle, bien visible.

Le taux de chômage en France a diminué de 0,7 point au deuxième trimestre à 7,1%, selon les chiffres publiés le 13 août par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Déjà au premier trimestre, le taux de chômage avait reculé de 0,3 point, à 7,8%.

Ces reculs «en trompe-l'œil» selon l'Insee, sont inhérents à la définition même du chômeur au sens du Bureau international du travail (BIT), dont l’institut de statistiques utilise les chiffres.

Pour être chômeur au sens du BIT, il faut avoir 15 ans ou plus, être sans emploi pendant la semaine de référence ; disponible pour travailler dans les deux semaines à venir ; avoir effectué au cours des quatre dernières semaines une démarche active de recherche d'emploi ou trouvé un emploi qui commence dans les trois mois.

Selon cet indicateur, le nombre de chômeurs a ainsi diminué de 271 000, retombant à deux millions de personnes entre avril et juin.

Toutefois, d'autres données publiées jeudi par l'Institut de la statistique décrivent bien l'ampleur de la crise, selon Sylvain Larrieu de l'Insee, cité par l’AFP. Ce sont notamment les chutes à des niveaux historiquement bas du taux d'emploi et du nombre d'heures travaillées, ou encore la hausse à une échelle inédite du «sous-emploi». «Le confinement a mis en inactivité forcée toute une partie de la population, que ce soit des personnes en emploi ou des personnes sans emploi», rappelle-t-il, quelques jours après que l'Insee a annoncé la destruction de plus de 600 000 emplois au premier semestre dans le secteur privé, à cause de la crise du coronavirus.

Le taux d'emploi des 15-64 ans a diminué de 1,6 point, à 64,4%, son plus bas niveau depuis début 2017. La baisse est particulièrement marquée pour les jeunes de moins de 25 ans : -2,9 points à 26,6%, un plancher historique depuis que l'Insee le mesure (1975). 

Nette hausse du sous-emploi

Le «sous-emploi», c’est-à-dire la situation des personnes employées à temps partiel qui souhaiteraient travailler davantage, a bondi à 20% des personnes en emploi, soit 12 points de plus qu'au premier trimestre, un niveau inédit depuis que l'Insee mesure cet indicateur (1990). Conséquence du fort recours au chômage partiel, le nombre moyen d'heures hebdomadaires travaillées par emploi a reculé de 12,9% par rapport au premier trimestre et de 18% sur un an.

Le «halo autour du chômage», soit les personnes sans emploi qui en souhaitent un mais qui ne satisfont pas tous les critères du BIT pour être considérées comme chômeurs, traduit aussi la crise : «parmi les personnes inactives au sens du BIT, 2,5 millions souhaitent un emploi», en hausse de 767 000 par rapport au premier trimestre. La part du halo dans la population des 15-64 ans s'établit à 6% au deuxième trimestre, encore une fois un plus haut niveau depuis que l'Insee mesure cette indicateur (2003).

Mathieu Plane, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) explique quant à lui qu’en prenant en compte le taux d'emploi et le halo autour du chômage, «on a un tiers de la population en situation de travailler qui est inactive, alors qu'on est traditionnellement à 11-12%. C'est une déflagration massive».

Il s'attend à une hausse du taux de chômage au troisième trimestre, «s'il n'y a pas un reconfinement, avec des personnes en recherche d'emploi qui vont basculer du halo vers le chômage».